Page:Jaurès - Les Preuves.djvu/75

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Mais du 15 octobre 1894, où commence l’instruction, au 20 décembre 1894, où finissent les débats du procès, c’est le bordereau seul qui est opposé à Dreyfus. Bien mieux, après la condamnation, deux ou trois jours avant la dégradation, le commandant du Paty de Clam va voir Dreyfus pour le décider à des aveux que celui-ci refuse énergiquement.

Et le commandant, résumant une fois de plus les charges qui pèsent sur lui, lui dit : « On nous avait dit qu’un officier livrait des documents : c’était le fil. Le bordereau a mis un point sur ce fil. »

En vérité, le fil dont parle là M. du Paty n’était pas bien solide, puisque personne au ministère de la guerre ne s’était avisé d’ouvrir une enquête et de soumettre à une surveillance quelconque les officiers des bureaux.

Mais ce qui est à retenir, ici encore, de ce propos suprême de M. du Paty comme de l’acte d’accusation, ce qui éclate et domine, c’est que, avant, pendant et après le procès, c’est le bordereau seul qui chargeait Dreyfus.

En voici le texte :


Sans nouvelles m’indiquant que vous désirez me voir, je vous adresse cependant, monsieur, quelques renseignements intéressants :

1o Une note sur le frein hydraulique du 120 et la manière dont s’est conduite cette pièce ;

2o Une note sur les troupes de couverture (quelques modifications seront apportées par le nouveau plan) ;

3o Une note sur une modification aux formations de l’artillerie ;

4o Une note relative à Madagascar ;

5o Le projet de manuel de tir de l’artillerie de campagne (14 mars 1894).

Ce dernier document est extrêmement difficile à se procurer et je ne puis l’avoir à ma disposition que très peu de jours. Le ministre de la guerre en a envoyé un nombre fixe dans les corps et ces corps sont responsables ; chaque officier détenteur doit remettre le sien après les manœuvres. Si donc vous voulez y prendre ce qui vous intéresse et le tenir à ma disposition