Page:Jean Charles Houzeau - La terreur blanche au Texas et mon évasion, 1862.djvu/42

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dollars si vous remettez jamais les pieds dans l’État.»

— « J’y consens, je signerai, répondit le marchand.»

— « En outre, ajouta encore l’orateur, nous retenons comme une compensation du temps qu’il nous a fallu perdre, votre cheval, votre voiture et votre pacotille. Le tout sera vendu lundi, au plus offrant et dernier enchérisseur, au profit du fonds de ma compagnie.»

— « Bien ! bien ! s’écrièrent les jeunes gens en riant aux éclats, et en jetant des regards moqueurs au pauvre marchand. Bravo, capitaine Keen, répétèrent longtemps les voix.»

— « Maintenant, attention, mes boys[1], reprit encore le capitaine. En route, à la poursuite des runaways! La Providence, je l’espère, nous réserve bonne chance; il y a de belles prises à faire : la bande est hardie, et ceux qui la composent valent de l’argent. Ne tuez pas sans nécessité ; mais une cinquantaine de coups de fouet, enlevant de bonnes lanières de chair sur les côtes, seront d’un précieux exemple pour le prochain.»

Les cavaliers se séparèrent. Ceux qui appartenaient à l’expédition prirent le chemin des montagnes, pendant que les habitants des plantations voisines retournaient tranquillement chez eux. Je vis le pauvre marchand s’éloigner à pas lents, pensif et attristé, révolté sans doute dans son âme de tant d’injustice, et devenu abolitioniste s’il ne l’était auparavant. Quelles réflexions devaient provoquer, en effet, le despotisme et les rigueurs des maîtres d’esclaves! et quel ordre social que

  1. Jeunes garçons.