Page:Jean Charles Houzeau - La terreur blanche au Texas et mon évasion, 1862.djvu/83

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rude de l’hiver. Un norther ou vent du Nord se mit à souffler peu de temps après le coucher du soleil, et dura jusqu’au jour avec une violence inaccoutumée. Je n’avais pas d’abri, la prudence m’interdisait d’allumer du feu. Je me réchauffai avec peine en me serrant contre le flanc de mon cheval, qui, souffrant comme moi de la rigueur des éléments, se tint immobile et sans pâturer durant la nuit entière.

Le lendemain les charrettes arrivèrent l’une après l’autre. Nous terminâmes au milieu du bois les préparatifs de notre exode, et le 16 eut lieu notre départ définitif.

Le train qu’Alejandro Vidal dirigeait se composait de trois charrettes chargées de balles de coton. Crescencio Rodriguez, Félix Casanova et Carlos Uso (orthographiez ad libitum) conduisaient les attelages. J’avais six bœufs à manier. Monté sur un cheval docile, qui obéissait au seul mouvement des pieds, je portais des deux mains mon fouet gigantesque, frappant mes bœufs, les excitant au travail, les appelant de leurs noms familiers. Mes compagnons me soulageaient, je dois le dire, de la plupart des travaux matériels. Ils allaient le matin à la recherche des bœufs, ôtaient et mettaient les empièges, attelaient et dételaient quand nous étions sans témoins. J’avais appris cependant à mettre les animaux sous le joug et à les manier par les cornes.

Je portais le costume exact du roulier mexicain : un feutre lilas à grands bords plats, une lévite (leva) de flanelle jaune, et un pantalon de calicot à raies verticales rouges et blanches.

Nous avions devant nous la prairie vierge, coupée