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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/255

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de Sara, troisième et quatrième obstacle. – « Il n’hésita point en défiance de la promesse de Dieu (20) ». Dieu ne lui donna point de preuve, point de signe, mais de simples paroles, des promesses qui ne s’accordaient point avec la nature. Et pourtant « Il n’hésita « pas », nous dit l’apôtre. Il ne dit pas : Il ne refusa pas de croire, mais « Il n’hésita pas », c’est-à-dire, il ne douta pas, il ne chancela pas, malgré tant d’obstacles. Nous apprenons par là que quand Dieu nous promettrait mille choses impossibles, si celui qui les entendrait refusait d’y croire, cette faiblesse serait un effet de sa folie et non un résultat de la nature des choses. « Mais il se fortifia par la « foi ». Voyez la sagesse de Paul ! Comme il était question de ceux qui font les œuvres et de ceux qui traient, il montre que les derniers font plus que les premiers ; qu’ils ont besoin d’une plus grande grâce et de beaucoup de force et que leurs travaux ne sont pas des travaux vulgaires. En effet, on cherchait à déprécier la foi par la raison qu’elle n’avait point de travaux à supporter. Repoussant cette assertion, il fait voir que non seulement celui qui pratique la chasteté ou quelqu’autre vertu de ce genre, a besoin de force ; mais qu’il en faut une plus grande encore à celui qui a fait preuve de foi. Car comme le premier a besoin de vigueur pour repousser les suggestions de l’impureté, ainsi le second doit avoir une âme forte pour écarter les raisonnements de l’incrédulité. Comment donc Abraham est-il devenu fort ? Par la foi, nous dit Paul, et non en s’abandonnant aux raisonnements ; autrement il eût failli. Et comment a-t-il pratiqué la foi ? « En rendant gloire à Dieu, pleinement assuré que tout ce qu’il a promis, il est puissant pour le faire (21) »
Donc s’abstenir de toute recherche curieuse c’est glorifier Dieu, et s’y livrer c’est se rendre coupable. Si nous ne glorifions pas Dieu quand nous discutons et scrutons minutieusement des choses d’un ordre inférieur, nous le glorifions encore bien moins en sondant avec curiosité la génération du Maître ; c’est une injure que nous expierons par les derniers supplices. Car si nous ne devons pas même chercher la forme propre de la résurrection, beaucoup moins nous est-il permis de scruter ces profonds et terribles mystères. L’apôtre ne dit pas simplement croyant, mais « pleinement assuré ». Telle est la foi : beaucoup plus claire, plus persuasive que la démonstration par les raisonnements : car aucun raisonnement ne saurait plus l’ébranler. Celui que le raisonnement a convaincu, peut changer d’opinion ; mais celui que la foi a affermi, ferme ensuite l’oreille aux arguments qui pourraient la détruire. Après avoir dit qu’Abraham fut justifié par la foi, Paul fait voir que, par cette même foi, il a rendu gloire à Dieu : ce qui est le propre d’une vie vertueuse ; car il est écrit « Que votre lumière brille devant les hommes, afin qu’ils voient vos bonnes œuvres et qu’ils glorifient votre Père qui est dans les cieux ». (Mt. 5,16) Voilà qui parait être le résultat de la foi. Mais comme les couvres demandent de la force, aussi en demande la foi. Ici souvent le corps partage lui-même le travail, là l’âme seule suffit. En sorte que la difficulté est plus grande, parce que l’âme n’a pas toujours le corps pour auxiliaire.
6. Voyez-vous comme il démontre que tout ce qui tient aux œuvres, comme par exemple se glorifier devant Dieu, avoir besoin de force et de travail, rendre gloire à Dieu, existe à un bien plus haut degré dans la foi ? En disant que Dieu peut faire ce qu’il a promis, il rue semble prédire l’avenir : car ce ne sont pas seulement des biens présents, mais des biens futurs, que Dieu a promis : ceux-ci sont le type de ceux-là. Ainsi l’incrédulité est le propre d’une âme faible, étroite et misérable. Donc quand certains hommes nous font un crime de notre foi, en retour reprochons-leur leur incrédulité, les traitant de misérables, de pusillanimes, d’insensés, de faibles, qui n’ont rien de plus que les ânes. Car comme la foi est le signe d’une âme grande et sublime, ainsi l’incrédulité est le propre d’une âme tout à fait déraisonnable, très-vile et rabaissée au rang des animaux stupides.
Laissant donc de tels hommes de côté, imitons le patriarche, et glorifions Dieu, comme il l’a glorifié lui-même. Qu’est-ce que cela veut dire : Il a rendu gloire à Dieu ? Il a pensé à sa justice, à sa puissance infinie ; et ayant conçu de lui une idée juste, il a été pleinement assuré de l’exécution des promesses. Glorifions donc Dieu, nous aussi, par la foi et par les œuvres, afin d’obtenir pour récompense d’être glorifiés par lui : car il a dit : Je glorifierai ceux qui me glorifient. Du reste, quand même il n’y aurait pas de récompense, ce serait déjà une gloire d’être jugé digne de glorifier Dieu.