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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/256

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Si en effet ceux qui célèbrent les louanges des rois, s’en estiment honorés, n’en recueillissent-ils d’ailleurs aucun autre avantage ; songez quelle gloire ce serait pour nous que notre Maître fût glorifié en nous, et aussi de quel châtiment nous serions dignes, si nous étions cause qu’il fût blasphémé ? Toutefois c’est pour notre propre avantage qu’il veut être glorifié par nous, puisqu’il n’en a lui-même aucun besoin. Car quelle est, pensez-vous, la distance entre Dieu et l’homme ? Est-ce la même qu’entre l’homme et le ver de terre ? Mais dire cela, ce n’est rien dire ; cette distance ne saurait s’exprimer. Voudriez-vous donc être glorifié, célébré, par des vers de terre ? Non, sans doute. Eh bien ! si, malgré votre passion pour la gloire, vous n’y tenez pas ; comment Dieu, qui est exempt de cette passion et si élevé au-dessus de vous, aurait-il besoin de la gloire que vous pouvez lui rendre ? Et pourtant, bien qu’il n’en ait pas besoin, il déclare la désirer à cause de vous. S’il a daigné se faire esclave pour vous, pourquoi vous étonner de tout ce qu’il a pu faire encore dans le même but ? Il ne regarde comme indigne de lui rien de ce qui peut contribuer à notre salut.
Pénétrés de ces vérités, évitons tout péché qui pourrait le faire blasphémer. « Fuyez le péché », est-il écrit, « comme vous fuiriez à la vue d’un serpent ». Si vous en approchez, il vous mordra ; car ce n’est pas lui qui vient à nous, mais nous qui allons à lui. Dieu l’a ainsi réglé pour que le démon n’établisse point son empire tyrannique : autrement personne ne pourrait lui résister. Voilà pourquoi il l’a repoussé à l’écart comme un voleur et un tyran ; et à moins qu’il ne trouve quelqu’un seul et sans défense dans ses propres retraites, il n’ose pas attaquer ; à moins qu’il ne nous voie traverser le désert, il craint d’approcher or, le désert pour lui n’est pas autre chose que le péché. Nous avons donc besoin du bouclier de la foi, du casque du salut, du glaive de l’esprit ; non seulement pour nous garantir, mais encore pour lui trancher la tête, s’il veut s’élancer contre nous : nous avons besoin de prier continuellement, afin de le fouler sous nos pieds. Car il est impudent et détestable ; et quoiqu’il combatte d’en bas, il remporte cependant la victoire. La raison en est que nous ne nous mettons pas en peine de nous tenir au-dessus de ses coups ; car il ne saurait s’élever bien haut ; mais il se traîne à terre. Aussi le serpent est-il sa figure. Si Dieu lui a assigné cet état dès le commencement, à plus forte raison maintenant.
Mais si vous ne savez pas ce que c’est que de combattre d’en bas, j’essayerai de, vous expliquer cette manière de faire la guerre. Qu’est-ce donc que combattre d’en bas ? C’est lutter à l’aide des objets inférieurs, la volupté, la richesse, toutes les choses mondaines. Voilà pourquoi si le démon voit quelqu’un voler vers le ciel, il ne pourra d’abord s’élancer à sa poursuite ; en second lieu, s’il l’essayait, il retomberait bien vite : car il n’a pas de pieds, ne craignez rien ; il n’a pas d’ailes, n’ayez pas peur ; il rampe à terre et dans les choses terrestres. N’ayez donc rien de commun avec la terre et vous n’aurez pas besoin de combattre. Car il ne connaît pas la lutte corps à corps ; il trompe souvent par l’appât des richesses. Si vous coupez les épines, comme le serpent, il se cache dans les épines, il fuira au plus vite comme un lâche, et si vous savez employer contre lui les divins enchantements, il sera bientôt blessé. Car nous avons, oui, nous avons des enchantements spirituels : le nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ et la vertu de la croix. non seulement ces enchantements débusquent le dragon de ses retraites et le précipitent dans le feu, niais encore ils guérissent les blessures.
7. Que si beaucoup de ceux qui ont prononcé ce nom n’ont pas été guéris, cela ne vient pas de son impuissance, mais de leur peu de foi ; car les uns se pressaient autour de Jésus et le poussaient, sans y rien gagner ; et l’hémorroïsse, sans toucher son corps, par le seul contact de ses vêtements, fut guérie d’un flux de sang invétéré. Ce nom est terrible aux démons, aux passions et aux maladies. Faisons-nous en donc un ornement et un rempart. C’est ainsi que Paul est devenu grand, bien qu’il fût de même nature que nous ; mais la foi le transforma, et telle était sa puissance que ses vêtements mêmes avaient une grande vertu. Quelle sera donc notre excuse, si l’ombre, si les vêtements des apôtres chassaient les maladies et que nos prières ne puissent réprimer nos passions ? Et quelle en est la cause ? La grande différence des dispositions de l’âme, puisque tout ce qui tient à la nature est égal et commun entre lui et nous : car Paul a été engendré et nourri de la même manière que nous, il a habité la terre, il a respiré l’air