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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/30

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ni des railleries que vous subissez, ni des éloges dont vous êtes les objets. Qu’est-ce que tout cela ? Qu’y a-t-il d’avantageux dans ces louanges, qu’y a-t-il de funeste dans ces outrages ? Songez à ce jour terrible, à ce jour affreux où tout sera révélé. Alors nous nous glorifierons en vous, et vous vous glorifierez en nous ; vous vous glorifierez d’avoir des maîtres qui ne vous auront rien enseigné d’humain, dont la vie aura été sans reproche et sans tache ; nous aussi, nous serons heureux d’avoir eu des disciples qui, se tenant loin des missions humaines, n’auront jamais chancelé, et se seront empressés de recevoir avec franchise nos enseignements. Dès maintenant, il est vrai, tout cela est clair pour qui veut être attentif ; mais alors tous devront en être convaincus. Si donc aujourd’hui, nous sommes dans l’affliction, nous trouvons un puissant motif de consolation, dans le témoignage de notre conscience, et dans cette pensée qu’un jour tout sera manifesté. Maintenant notre conscience nous dit que tout ce que nous Taisons, nous le faisons par la grâce du Seigneur ; et vous ne l’ignorez pas vous-mêmes ; et vous le saurez encore mieux plus tard. Mais au jour du jugement, tous les hommes connaîtront vos actions et les nôtres, et verront que nous sommes glorifiés les uns par les autres.
L’apôtre ne se réserve donc pas à lui seul cet éclat dont ses vertus l’environnent ; il l’étend aussi sur les Corinthiens ; il les distrait ainsi de la tristesse qui les accable. Il leur disait, tout à l’heure : C’est à cause de vous que nous sommes consolés ; maintenant il leur attribue sa propre gloire : « C’est à cause de vous que nous nous glorifions », continuant de la sorte à les associer à tout ce qui le concerne, à ses consolations, à ses souffrances, à son salut ; car c’est à leur prière qu’il attribue sa délivrance. « Vous nous avez aidés de vos prières », leur dit-il, « et Dieu nous a délivrés ». De même en cet endroit il partage sa gloire avec eux. Comme il disait plus haut : « Sachant que vous vous unissez à nos consolations, comme à nos souffrances » ; il leur dit encore maintenant : « Nous sommes votre gloire, comme vous êtes la nôtre. – Et c’est avec cette persuasion que je voulais aller a vous voir (15) ». De quelle persuasion s’agit-il ? C’est que j’ai toute confiance en vous, je me glorifie en vous, je suis votre gloire, je vous aime, ma conscience ne me reproche rien ; en moi tout est selon l’Esprit, et j’ai en vous d’irrécusables témoins. « Je voulais donc venir vous voir ; et de Corinthe passer ensuite en Macédoine (16). » Dans la première épître il leur annonçait tout le contraire : « J’irai vous voir », disait-il, « quand j’aurai traversé la Macédoine ; car je traverserai la Macédoine » : Pourquoi donc se contredire ensuite ? Non, l’apôtre ne se contredit pas. Sans doute ce qu’il écrit maintenant est opposé à ce qu’il écrivait précédemment, mais non pas à ce qu’il voulait alors. Aussi ne dit-il pas : « Je vous ai écrit que j’irais en Macédoine » ; mais bien : « Je voulais ». Bien que je ne vous l’aie pas dit dans ma lettre, tel était cependant mon désir et ma volonté. Et j’étais si éloigné de songer à différer l’accomplissement de ma promesse, que j’ai voulu le hâter. « Pour que vous ayez une seconde faveur ». Que veut-il dire par là ? une seconde faveur : c’est-à-dire une double faveur : son épître d’abord, sa présence ensuite. Par faveur, il entend la joie qu’il leur causera. « Et de Corinthe je passerai en Macédoine, de Macédoine je reviendrai au milieu de vous, et je prendrai ensuite congé de vous pour aller en Judée. En vous faisant cette promesse, ai-je agi légèrement (17) ? »
3. Ici il repousse tout reproche au sujet de son retard et de son absence. Voici la pensée de l’apôtre : Je voulais aller vous voir ; pourquoi donc ne l’ai-je pas fait ? Est-ce par légèreté et par inconstance ? Non ; certes. Pourquoi donc ? « Parce que les pensées que je médite ne sont point des pensées charnelles » ; qu’est-ce à dire : « ne sont point des pensées charnelles ? » c’est-à-dire : « chez moi, oui c’est oui ; et non, c’est non ». Mais ici encore il y a quelque obscurité. Que signifient donc ces paroles ? L’homme charnel,'l’homme qui s’attache aux biens de ce monde, et qui s’en occupe sans cesse, qui jamais ne suit les mouvements de l’Esprit-Saint, peut bien errer dans sa marche ; mais le serviteur de l’Esprit-Saint, l’homme qu’il inspire et qu’il dirige n’est point maître de ses résolutions : il dépend de cette puissance surnaturelle. Il ressemble à ce serviteur fidèle qui suit, en tout les ordres de son maître, qui va où il l’envoie, qui n’a plus de volonté propre, qui ne s’est pas même réservé la faculté de respirer librement ; s’il fait quelque promesse à d’autres serviteurs, et que le maître ensuite en ordonne autrement, il ne peut