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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/31

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plus tenir ce qu’il a promis. C’est donc parce que je ne prends point conseil de la chair et que je me laisse diriger par l’Esprit-Saint, que je ne suis point libre d’aller où je veux. Car je me soumets à l’empire et aux ordres du Paraclet, et j’accepte en tout ses décisions. Voilà pourquoi je n’ai pu aller vous voir : c’est que tel n’était pas le bon vouloir de l’Esprit Saint. On voit aussi dans le livre des Actes que souvent l’apôtre dut ne pas tenir sa promesse il se proposait de se rendre en quelque ville, et l’Esprit-Saint l’envoyait ailleurs. Il n’y a donc ni légèreté, ni inconstance de ma part, si je ne suis pas allé à Corinthe, mais je devais obéir à l’Esprit, auquel je me soumets toujours.
Ne reconnaissez-vous point le raisonnement habituel de l’apôtre ? De ce qu’il n’avait pas tenu sa promesse, ses adversaires voulaient conclure qu’il suivait les conseils de la chair ; et c’est en partant de cette apparente violation de sa promesse qu’il leur montre son obéissance aux mouvements du Saint-Esprit, et qu’il leur prouve que se conduire autrement t’eût été agir, selon la chair. Mais, direz-vous, n’est-ce pas l’Esprit-Saint qui lui avait inspiré cette promesse ? Non. Paul ne savait point tout ce qui pouvait arriver, ni tout ce qui pouvait être avantageux. C’est pourquoi, dans sa première épître, il disait aux Corinthiens : « Afin que vous me conduisiez, en quelque lieu que j’aille » (1Cor. 16,6), craignant sans doute qu’après avoir mentionné la Judée ; il ne fut obligé d’aller ailleurs. Alors toutes ses espérances avaient été déçues ; mais il peut dire maintenant que son intention était de passer ensuite en. Judée. Dans la première épître il leur dit expressément ce que sa charité pour eux lui dicte en leur annonçant sa visite ; mais qu’ensuite il se, rendit en Judée ou ailleurs, peu leur importait, et c’est pourquoi il ne détermine aucun pays. Maintenant qu’il sait clairement qu’il passera en Judée, il n’hésite plus à le leur dire.
Ces hésitations tournaient à l’avantage de ; Corinthiens ; elles les empêchaient d’avoir de l’apôtre une opinion exagérée. Si en effet, malgré tout cela, on voulut parfois lui offrir des sacrifices, à quel excès d’impiété ne se fût-on point porté, si les apôtres n’eussent donné mille preuves de la faiblesse naturelle à l’homme ? Ne vous étonnez point que, l’apôtre ait ignoré certains faits à venir ; dans ses prières, n’ignore-t-il point ce qui lui est avantageux ? « Nous ne savons pas, dit-il, ce qu’il nous est expédient de demander ». (Rom. 8,26) Ce qu’il dit, non seulement pour donner une bonne opinion de sa modestie, mais encore pour montrer qu’il ignore ce qui est véritablement utile. Et en quelles circonstances l’a-t-il ignoré ? Quand il demandait à Dieu d’être délivré de ses tentations. Voici ses paroles : « Et je sentis l’aiguillon de la chair, l’ange de Satan qui me souffletait. C’est pourquoi je priai trois fois le Seigneur, et il me dit : Ma grâce te suffit ; car ma puissance se montre toute entière dans tes infirmités ». Vous le voyez donc, il ne savait pas demander ce qui était expédient. Aussi ne fut-il peint exaucé, malgré sa persévérance.
« Dieu, qui est fidèle, m’est témoin qu’il n’y a point eu de oui et de non dans la parole que je vous ai annoncée (18) ». Il prévoit une objection qu’il se hâte de détruire. Les Corinthiens pouvaient dire en effet : Si après nous avoir promis de venir, vous avez cependant mis tant de retard, et qu’ainsi on ne puisse pas se fier à votre parole, si vous renversez ensuite ce que vous avez établi, comme vous l’avez fait en cotte occasion ; malheur à nous ! Peut-être en sera-t-il de même pour la prédication de l’Évangile ? Pour prévenir cette pensée, et le trouble qu’elle eût produit, il leur dit donc « Dieu m’est témoin qu’il n’y a pas de oui et de non dans la parole que je vous ai annoncée ». Ce qui s’est passé relativement à ma promesse, n’a pas lieu dans la prédication de l’Évangile, mais seulement dans la direction de mes voyages. Tout ce que nous vous avons enseigné demeure ferme et immuable. Il s’agit ici de la prédication de l’Évangile. Et il donne une preuve certaine de la vérité de ses, enseignements, en rapportant à Dieu cette prédication tout entière. Voici le sens de ses paroles. C’est de moi-même que je vous ai promis d’aller à Corinthe, et cette promesse était tolite spontanée. Mais ce n’est pas de moi-même que je vous ai prêché l’Évangile ; cette prédication n’a rien d’humain, elle est toute divine. Or ce qui vient de Dieu ne peut être sujet au mensonge. Aussi l’apôtre dit-il : « Or Dieu est fidèle », c’est-à-dire, véridique. C’est pourquoi vous ne pouvez vous défier, d’enseignements qui viennent de lui : car ces enseignements n’ont rien d’humain. Quelle parole il a en vue, il l’expose dans ce qui suit.