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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 10, 1866.djvu/538

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de l’Esprit consiste en toute bonté, justice et vérité ; examinant ce qui est agréable à Dieu (9, 10) ».

« En toute bonté ». Ceci s’adresse aux violents, aux emportés. « Justice » ; ceci regarde les avares. « Vérité » ; voilà pour les faux plaisirs. Évitez les pratiques dont j’ai parlé, veut-il dire, et suivez une conduite tout opposée. « En toute ». Autrement dit, il faut en toute chose produire des fruits spirituels. « Examinant ce qui est agréable à Dieu ». Donc les pratiques dont il a été question ne conviennent qu’à des esprits puérils, sans maturité. « Ne vous associez point aux œuvres infructueuses des ténèbres, mais plutôt réprouvez-les ; car ce qu’ils font en secret est, honteux même à dire. Or tout ce qui est répréhensible se découvre par la lumière (2, 13) ». Il a dit : « Vous êtes lumière ». Or, la lumière découvre les choses accomplies dans les ténèbres. Ainsi donc, « si vous êtes vertueux et irréprochables, les méchants ne pourront rester cachés. De même que la lumière d’une lampe se projette sur toutes les personnes présentes et empêche les voleurs d’entrer : de même, si votre lumière brille, les méchants seront confondus. Il faut donc confondre les coupables. Mais alors, pourquoi est-il écrit : « Ne jugez point, afin que vous ne soyez pas jugés ? » (Mat. 7,1) Paul ne dit pas condamner, mais confondre, c’est-à-dire corriger. Quant au précepte « Ne jugez point », il concerne les petits péchés. Voyez ce qui suit : « Pourquoi vois-tu la paille qui est dans l’œil de ton frère, et ne remarques-tu pas la poutre qui est dans ton œil ? » Voici le sens de ces paroles : Ainsi qu’une plaie, tant qu’elle reste invisible et cachée, et exerce ses ravages à l’intérieur, n’est l’objet d’aucun soin, de même le péché, tant qu’il demeure ignoré, se commet hardiment à la faveur de cette espèce de ténèbres ; mais quand il est découvrit, la lumière paraît : la lumière n’est pas le péché (comment cela se pourrait-il ?), mais le pécheur. En effet, quand il s’est vu dénoncé, réprimandé, qu’il s’est repenti, qu’il a obtenu rémission, est-ce que ses ténèbres ne sont pas dissipées par vos soins ? N’avez-vous pas guéri sa blessure ? N’avez-vous pas converti en production sa stérilité ? Voilà ce que veut dire Paul, ou encore : Votre vie, se passant au grand jour, est lumière ; car nul ne cache sa vie, quand elle est irréprochable : cacher une chose, c’est vouloir l’ensevelir dans les ténèbres. « De là ces paroles : Réveille-toi, toi qui dors, lève-toi du milieu des morts, et le Christ répandra sur toi sa lumière (14) ». Ces expressions : Mort et endormi, désignent le pécheur : car il sent mauvais comme les morts ; il est impuissant comme l’homme endormi : comme lui, il ne voit rien, il rêve, il fait des songes. Les uns lisent : « Tu toucheras le Christ » ; les autres : « Le Christ répandra sur toi sa lumière ». C’est plutôt ceci : Renoncez au péché, et vous pourrez voir le Christ : « Car celui qui fait le mal, hait la lumière, et ne va pas vers la lumière ». (Jn. 3,20) Donc, celui qui ne fait pas le mal, va vers elle.

2. Mais Paul ne dit pas cela seulement pour les incrédules : beaucoup de croyants ne sont pas moins attachés à leurs vices que les incrédules ; quelques-uns mêmes, beaucoup plus. À eux aussi, il est donc nécessaire de leur dire : « Éveille-toi, toi qui dors : lève-toi du milieu des morts, et le Christ répandra sur toi sa lumière ». À eux aussi s’applique la parole : « Dieu n’est point le Dieu des morts, mais des vivants ». (Mat. 22,32) Vivons donc, s’il n’est pas le Dieu des morts. – Mais il y a des gens qui voient une hyperbole dans ce passage : « Avare, ce qui est une idolâtrie ». Ce n’est pas une hyperbole, mais l’expression de la vérité. Comment ? de quelle façon ? Parce que l’avare s’éloigne de Dieu, tout comme l’idolâtre. Et pour vous convaincre que ce ne sont point ici des paroles en l’air, rappelez-vous cette sentence du Christ : « Vous ne pouvez servir Dieu et Mammon ». (Mat. 6,24) Servir Mammon, c’est renoncer au service de Dieu : ceux qui renient son autorité pour se faire les esclaves d’un métal inanimé, sont manifestement idolâtres. Mais je n’ai pas façonné d’idole, diront-ils, je n’ai pas érigé d’autel, sacrifié de victimes, répandu de vin en forme de libations : loin de là, je suis venu à l’Église, j’ai élevé les mains vers le Fils unique de Dieu ; je participe aux sacrements, je m’associe aux prières, je remplis pour ma part tous les devoirs du chrétien. Comment donc peut-on dire que j’adore les idoles ? Et voilà justement ce qu’il y a de plus étonnant : c’est que connaissant par expérience et pour y avoir goûté la bonté divine, instruit de la charité du Seigneur, vous ayez quitté ce maître charitable pour un cruel