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Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/111

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l’autre, aussi ont-ils guerre ouverte et continuelle, tant contre tous leurs voisins, que generalement contre tous les estrangers. Que s’ils sont pressez et poursuyvis de leurs ennemis (lesquels cependant ne les ont jamais sceu veincre ni dompter), ils vont si bien du pied et courent si viste, que non seulement ils evitent en ceste sorte le danger de mort, mais mesmes aussi quand ils vont à la chasse, ils prennent à la course certaines bestes sauvages, especes de cerfs et biches. Au surplus, combien que ainsi que tous les autres Bresiliens ils aillent entierement nuds, si est-ce neantmoins que contre la coustume plus ordinaire des hommes de ces pays-là (lesquels comme j’ay jà dit et diray encores plus amplement, se tondent le devant de la teste, et rongnent leur perruque sur le derriere) eux portent les cheveux longs et pendans jusqu’aux fesses. Bref, ces diablotins d’Ouetacas demeurans invincibles en ceste petite contrée, et au surplus comme chiens et loups, mangeans la chair crue, mesme leur langage n’estant point entendu de leurs voisins, doyvent estre tenus et mis au rang des nations les plus barbares, cruelles et redoutées qui se puissent trouver en toute l’Inde Occidentale et terre du Bresil. Au reste, tout ainsi qu’ils n’ont, ni ne veulent avoir nulle acointance ni traffique avec les François, Espagnols, Portugallois, ni autres de ce pays d’outre mer de pardeçà, aussi ne sçavent-ils que c’est de nos marchandises. Toutesfois, selon que j’ay depuis entendu d’un truchement de Normandie, quand leurs voisins en ont et qu’ils les en veulent accommoder, voici leur façon et maniere de permuter. Le Margajat, Cara-ja, ou Tououpinambaoult, (qui sont les noms des trois nations voisines d’eux) ou autres sauvages de ce pays-là, sans se fier ni approcher de l’Ouetaca, luy monstrant de loin ce qu’il aura, soit