Aller au contenu

Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 1, 1880.djvu/123

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

debout et allegant que les capitaines, maistres de navires, matelots et autres qui y ayant assistez n’avoyent encores fait profession de la Religion reformée, n’estoyent pas capables d’un tel mystere, les faisant sortir dehors ne voulut pas qu’ils vissent administrer le pain et le vin. Davantage luy mesme, tant comme il disoit, pour dedier son fort à Dieu, que pour faire confession de sa foy en la face de l’Eglise, s’estant mis à genoux sur un carreau de velours (lequel son page portoit ordinairement apres luy) prononça à haute voix deux oraisons, desquelles ayant eu copie, à fin que chacun entende mieux combien il estoit mal-aisé de cognoistre le coeur et l’interieur de cest homme, je les ay ici inserées de mot à mot, sans y changer une seule lettre.

Mon Dieu, ouvre les yeux et la bouche de mon entendement, adresse-les à te faire confession, prieres, et actions de graces des biens excellens que tu nous as faits ! Dieu tout puissant, vivant et immortel, Pere Eternel de ton Fils Jesus Christ nostre Seigneur, qui par ta providence avec ton Fils gouvernes toutes choses au ciel et en terre, ainsi que par ta bonté infinie tu as fait entendre à tes esleus depuis la creation du monde, specialement par ton Fils, que tu as envoyé en terre, par lequel tu te manifestes : ayant dit à haute voix, Escoutez-le : et apres son ascension par ton sainct Esprit espandu sur les Apostres : je recongnoy à ta saincte Majesté (en presence de ton Eglise, plantée par ta grace en ce pays) de coeur, que je n’ay jamais trouvé par la preuve que j’ay faite, et par l’essay de mes forces et prudence, sinon que tout le mien qui en peut sortir sont pures œuvres de tenebres, sapience de chair, polue en zele de vanité, tendant au seul but et utilité de mon corps. Au moyen de quoy