Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/101

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la repudier et renvoyer avec honte. Il est vray que les peres et parens, avant que marier leurs filles, ne font pas grand difficulté de les prostituer au premier venu : de maniere, ainsi que j’ay jà touché autre part, qu’encores que les Truchemens de Normandie, avant que nous fussions en ce pays-là, en eussent abusez en plusieurs villages, pour cela elles ne reçevoyent point note d’infamie : mais estans mariées, à peine, comme j’ay dit, d’estre assommées, ou honteusement renvoyées, qu’elles se gardent bien de trebuscher. Je diray davantage, veu la region chaude où ils habitent, et nonobstant ce qu’on dit des Orientaux, que les jeunes gens à marier, tant fils que filles de ceste terre-la, ne sont pas tant adonnez à paillardise qu’on pourroit bien estimer : et pleust à Dieu qu’elle ne regnast non plus par deçà : toutesfois, à fin de ne les faire pas aussi plus gens de bien qu’ils ne sont, parce que quelques fois en se despitans l’un contre l’autre, ils s’appellent Tyvire, c’est à dire bougre, on peut de la conjecturer (car je n’en afferme rien) que cest abominable pesché se commet entr’eux. Au reste, quand une femme est grosse d’enfant, se gardant seulement de porter quelques fardeaux pesans, elle ne lairra pas au demeurant de faire sa besongne ordinaire : comme de fait les femmes de nos Toüoupinambaoults travaillent sans comparaison plus que les hommes ; car excepté quelques matinées (et non au chaut du jour) qu’ils coupent et essertent du bois pour faire les jardins, ils ne font gueres autre chose qu’aller à la guerre, à la chasse, à la pescherie, fabriquer leurs espées de bois, arcs, flesches, habillemens de plumes et autres choses que j’ay specifiées ailleurs, dont ils se parent le corps. Touchant l’enfantement, voici ce que, pour l’avoir veu, j’en puis dire à la verité. C’est qu’un autre Fran-