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CHAPITRE XXI


De nostre departement de la terre du Bresil, dite Amerique : ensemble des naufrages et autres premiers perils que nous eschapasmes sur mer à nostre retour.


Pour bien comprendre l’occasion de nostre departement de la terre du Bresil, il faut reduire en memoire ce que j’ay dit ci-devant à la fin du sixiesme chapitre : assavoir qu’apres que nous eusmes demeuré huict mois en l’isle où se tenoit Villegagnon, luy, à cause de sa revolte de la Religion reformée, se faschant de nous, ne nous pouvant domter par force, nous contraignit d’en sortir, tellement que nous nous retirasmes en terre ferme, à costé gauche en entrant en la riviere de Ganabara, autrement dite Genevre, seulement à demi lieuë du fort de Coligny situé en icelle, au lieu que nous appellions la Briqueterie : auquel, dans certaines telles quelles maisons que les manouvriers François, pour se mettre à couvert quand ils alloyent à la pescherie ou autres affaires de ce costé-là, y avoient basties, nous demeurasmes environ deux mois. Durant ce temps les sieurs de la Chapelle et de Boissi, lesquels nous avions laissez avec Villegagnon, l’ayant abandonné pour la mesme cause que nous avions fait : assavoir parce qu’il avoit tourné le dos à l’Evangile, se vindrent renger et joindre en nostre compagnie, et furent compris au marché de six cents