Page:Jean de Léry - Voyage au Brésil - Gaffarel vol 2, 1880.djvu/46

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Mais, avant que faire marcher nos Toüoupinambaoults en bataille, il faut savoir quelles sont leurs armes.

Ils ont premierement leurs Tacapes, c’est à dire espées ou massues, faites les unes de bois rouge, et les autres de bois noir, ordinairement longues de cinq à six pieds : et quant à leur façon, elles ont un rond, ou oval au bout d’environ deux palmes de main de largeur, lequel, espais qu’il est de plus d’un pouce par le milieu, est si bien menuisé par les bords, que cela (estant de bois dur et pesant comme buis) tranchant presque comme une coignée, j’ay opinion que deux des plus accorts spadassins de par deçà se trouveroyent bien empeschez d’avoir affaire à un de nos Toüoupinambaoults, estant en furie, s’il en avoit une au poing.

Secondement ils ont leurs arcs, qu’ils nomment Orapats, faits des susdits bois noir et rouge, lesquels sont tellement plus longs et plus forts que ceux que nous avons par deçà, que tant s’en faut qu’un homme d’entre nous le peust enfonçer, moins en tirer, qu’au contraire ce seroit tout ce qu’il pourroit faire d’un de ceux des garçons de neuf ou dix ans de ce pays-là. Les cordes de ces arcs sont faites d’une herbe que les sauvages appellent Tocon : lesquelles, bien qu’elles soyent fort desliées, sont neantmoins si fortes qu’un cheval y tireroit. Quant à leurs flesches, elles ont environ une brasse de longueur, et sont faites de trois pieces : assavoir le milieu de roseau, et les deux autres parties de bois noir : et sont ces pieces si bien raportées, jointes et liées, avec de petites pelures d’arbres, qu’il n’est pas possible de les mieux agencer. Au reste, elles n’ont que deux empennons, chacun d’un pied de long, lesquels (parce qu’ils n’usent point de colle) sont aussi fort proprement liez et accommodez