Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.5-1820.djvu/195

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on autorité,

Est la punition, de cette impunité ;

Votre valeur, enfin, naguère si vantée, [95]

Dans vos folles amours languit comme enchantée,

Et par cette langueur, dedans tous les esprits

Efface son estime, et s'acquiert des mépris ;

Et je vois toutefois, qu'un heur inconcevable,

Malgré tous ces défauts, vous rend encore aimable ; [100]

Et que votre bon astre, en ces mêmes esprits,

Souffre ensemble pour vous, l'amour et le mépris ;

Par le secret pouvoir, d'un charme que j'ignore,

Quoiqu'on vous mésestime, on vous chérit encore ;

Vicieux on vous craint, mais vous plaisez heureux, [105]

Et pour vous, l'on confond, le murmure, et les voeux ;

Las ! Méritez, mon fils, que cette amour vous dure,

Pour conserver les voeux, étouffez le murmure ;

Et régnez dans les coeurs, par un sort dépendant,

Plus de votre vertu, que de votre ascendant ; [110]

Par elle, rendez-vous, digne d'un diadème,

Né pour donner des lois, commencez par vous-même ;

Et que pas vos passions, ces rebelles sujets,

De cette noble ardeur, soient les premiers objets ;

Par ce genre de règne, il faut mériter l'autre, [115]

Par ce degré, mon fils, mon trône sera vôtre ;

Mes États, mes sujets, tout fléchira sous vous,

Et sujet de vous seul, vous régnerez sur tous ;

Mais si toujours vous-même, et toujours cerf du vice

Vous ne prenez des lois, que de votre caprice ; [120]

Et si pour encourir, votre indignation,

Il ne faut qu'avoir part, en mon affection ;

Si votre humeur hautaine, enfin, ne considère,

Ni les profonds respects, dont le Duc vous révère,

Ni l'étroite amitié, dont l'infant vous chérit ; [125]