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NATALIE.

Allez ; n’espérez pas que ni force ni crainte
Puissent rien où mes pleurs n’ont fait aucune atteinte ;
Je connois trop son cœur, j’en sais la fermeté,
Incapable de crainte et de légèreté.
À regret contre lui je rends ce témoignage,
Mais l’intérêt du ciel à ce devoir m’engage.
Encor un coup, cruel, au nom de notre amour,
Au nom saint et sacré de la céleste cour,
Reçois de ton épouse un conseil salutaire :
Déteste ton erreur, rends-toi le ciel prospère ;
Songe et propose-toi que tes travaux présens,
Comparés aux futurs, sont doux, ou peu cuisans.
Vois combien cette mort importe à ton estime,
D’où tu sors, où tu vas, et quel objet t’anime.

ADRIEN.

Mais toi, contiens ton zèle, il m’est assez connu,
Et songe que ton temps n’est pas encor venu ;
Que je te vais attendre à ce port désirable.
(À Flavie.)
Allons, exécutez le décret favorable,
Dont j’attends mon salut plutôt que le trépas.

FLAVIE.

Vous en êtes coupable, en ne l’évitant pas.

(Il sort. Le geôlier et les gardes emmènent Adrien.)
NATALIE, seule.

J’ose à présent, ô ciel, d’une vue assurée,
Contempler les brillans de ta voûte azurée,
Et nier ces faux dieux qui n’ont jamais foulé
De ce palais roulant le lambris étoilé.