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Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.5-1820.djvu/60

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Scène V.

ADRIEN, NATALIE, FLAVIE, Gardes.
FLAVIE.

Aux desseins importans, qui craint, impatiente.
Eh bien, qu’obtiendrons-nous ? vos soins officieux
À votre époux aveugle, ont-ils ouvert les yeux ?

NATALIE.

Nul intérêt humain, nul respect ne le touche ;
Quand j’ai voulu parler il m’a fermé la bouche,
Et détestant les dieux, par un long entretien,
A voulu m’engager dans le culte du sien.
Enfin ne tentez plus un dessein impossible,
Et gardez que, heurtant ce cœur inaccessible,
Vous ne vous y blessiez pensant le secourir,
Et ne gagniez le mal que vous voulez guérir ;
Ne veuillez point son bien à votre préjudice ;
Souffrez, souffrez plutôt que l’obstiné périsse ;
Rapportez à César notre inutile effort ;
Et si la loi des dieux fait conclure à sa mort,
Que l’effet prompt et court en suive la menace :
J’implore seulement cette dernière grâce.
Si de plus doux succès n’ont suivi mon espoir,
J’ai l’avantage au moins d’avoir fait mon devoir.

FLAVIE.

Ô vertu sans égale, et sur toutes insigne !
Ô d’une digne épouse époux sans doute indigne !
Avec quelle pitié le peut-on secourir,
Si, sans pitié de soi, lui-même il veut périr ?