Page:Jean de Rotrou-Oeuvres Vol.5-1820.djvu/72

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Et je sais que jamais, pour la peur du trépas,
Un cœur touché du Christ n’a rebroussé ses pas.
Va donc, heureux ami, va présenter ta tête
Moins au coup qui t’attend qu’au laurier qu’on t’apprête ;
Va de tes saints propos éclore les effets,
De tous les chœurs des cieux va remplir les souhaits.
Et vous, hôtes du Ciel, saintes légions d’anges,
Qui du nom trois fois saint célébrez les louanges,
Sans interruption de vos sacrés concerts,
À son aveuglement tenez les cieux ouverts.

ADRIEN.

Mes vœux arriveront à leur comble suprême,
Si, lavant mes péchés de l’eau du saint baptême,
Tu m’enrôles au rang de tant d’heureux soldats,
Qui sous même étendard ont rendu des combats.
Confirme, cher Anthisme, avec cette eau sacrée
Par qui presque en tous lieux la croix est arborée,
En ce fragile sein le projet glorieux,
De combattre la terre et conquérir les cieux.

ANTHISME.

Sans besoin, Adrien, de cette eau salutaire,
Ton sang t’imprimera ce sacré caractère ;
Conserve seulement une invincible foi,
Et combattant pour Dieu, Dieu combattra pour toi.

ADRIEN, après un moment de réflexion.

Ah ! Lentule ! en l’ardeur dont mon âme est pressée,
Il faut lever le masque et t’ouvrir ma pensée :
Le Dieu que j’ai haï m’inspire son amour,
Adrien a parlé, Genest parle à son tour.
Ce n’est plus Adrien, c’est Genest qui respire,
La grâce du baptême et l’honneur du martyre,