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Page:Jeanne Landre-Echalote et ses amants 1909.djvu/223

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encore un endroit où l’on s’amuse

avaient réorganisé un corps de mousquetaires où, sans uniformes rouges ou gris, on se battait comme Porthos et l’on aimait comme d’Artagnan.

Chacun, cette nuit-là, avait sa chacune. Hélas, les conquistadors d’aujourd’hui ne trouvent pas d’amazones pour partager leur couche et, dans l’impossibilité de se choisir des compagnes dignes d’eux, s’en rapportent aux quelconques volailles pour statuer sur leurs qualités guerrières en champs clos. César de Ménilmontant chaperonnait une ingénue d’hier, fraîche comme l’aubépine, ferme comme un brugnon et empanachée comme François Ier au camp du Drap d’Or. Désireuse de faire croquer toutes les pommes du paradis terrestre, y compris celles de ses joues et quelques autres, elle se fiait à César pour la piloter dans les établissements chics. Brasier d’Acières avait à sa droite une brune et piquante comédienne dont on le disait si amoureux qu’il fallait rouler plusieurs fois ses yeux dans leurs orbites avant de les arrêter sur elle. Pour un regard il vous eût provoqué, pour une parole il vous eût embroché. La belle le savait et, gentiment peureuse, se contentait de contempler le décor, ce qui, pour tout le monde, était sans importance. Quant à Guadalquivir, admirateur, comme au premier jour, des formes harmonieuses du Lapin-russe, il la chérissait à sa manière, soit en la gavant comme une dinde prête à tuer, soit en la bourrant, dans les régions charnues, de coups de poing affectueux et de claques creuses. On en avait plein la main partout où l’on tapait, et Gua-

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