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léités pour les sciences, tu y seras chez toi. Désires-tu devenir un Esculape, artiste du bistouri ou du stéthoscope, tu ne saurais trouver mieux. Enfin, pour tout ce qui concerne les hautes études, et non seulement au point de vue théorique, mais à celui de la grande pratique. Veux-tu faire une rigolade, comme ils disent, alors ça y est, tu ne trouveras nulle part rien de semblable, tout est ouvert, pas d’hypocrisie, pas de ces écrans qui cachent le vice, mais le plein jour que les esprits francs et ouverts ne craignent pas.

« Tout cela c’est fort beau, dit Pelquier ; mais, dis-moi, lorsque tu étais là, y as-tu rencontré beaucoup de Canayens ?

« J’te “cré”, dit Baptiste, et des quantités, mais il ne faut pas croire que tous ceux qui vont là y sont que pour s’amuser. La grande majorité y sont pour étudier et rapporter à leurs concitoyens le fruit de leurs études et les faire bénéficier des connaissances qu’ils y ont acquises.

« Et au nombre de ceux que tu as vus là-bas, y avait-il d’assez intéressants ? demanda Pelquier.

« Pour ça, oui, même certains d’entre eux m’ont vivement amusés, mais j’en ai rencontré un surtout qui valait son pesant d’or, un drôle de coco, bon garçon, naïf au possible et dont tu vas prendre d’autant plus d’intérêt qu’il jouera, je n’en doute pas, un assez grand rôle dans les projets d’avenir dont je t’ai parlé.

« Et qu’avait-il de si particulier, ce brave homme ? demanda Pelquier.

« Particulier ! dit Courtemanche en éclatant de rire, écoute et tu vas juger par toi-même.[1]

« J’habitais à cette époque un hôtel de famille situé au No 49 de la rue Bonaparte et s’appelant l’Hôtel St-Georges. Ce n’était certes pas l’Hôtel Continental ni le Grand Hôtel, mais plutôt une hôtellerie de famille où l’on trouvait bon gîte et bonne table. L’on y rencontrait beaucoup d’étudiants à l’aise et à cette époque était très fréquentée par les Canadiens-français.

« Un matin que je revenais d’une promenade matinale dans les jardins du Luxembourg, mon attention fut attirée — ceci en face de mon hôtel — par un individu qui s’était posé comme un piquet juste au coin de la rue Bonaparte et de la rue du Four.

« Cet individu avait une apparence si cocasse que je ne pus m’empêcher de l’observer. Figure-toi un bonhomme petit, ven-

  1. Cette histoire, sauf les noms, est absolument authentique.