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miers coups de dix heures, un cri terrible, surhumain, retentit, et une clameur immense suivi d’un bouleversement incroyable se fit entendre : « Le bolide ! »

Alors il se produisit quelque chose d’incroyable, d’inouï, que l’imagination la plus féconde ne saurait au juste écrire. Ce peuple qui tantôt avait passé successivement du rire à l’impatience, devait après l’exaltation la plus vive être frappé d’une terreur inimaginable.

Tous se jetèrent à plat ventre, croyant leur dernière heure venue, les fenêtres se dégarnirent, des grappes humaines dégringolèrent des toits, soit par les lucarnes ou les échelles de sauvetage.

On vit des avocats en perdre la parole, des maris pardonner à leur femme, des gendres embrasser leur belle-mère, et du haut de son échelle on put voir Mame Pelquier (née Philornène Tranchemontagne de Shawinigan) qui récitait à haute voix son acte de contrition.

Quelques-uns plus braves que les autres ouvrirent un œil après avoir levé la tête, et aperçurent terrifiés l’énorme « Wawaron » dont le drapeau constellé d’étoiles d’or sur azur flottait triomphalement.

Alors ce fut un brouhaha, une explosion de vivats qui troubla l’atmosphère, tous étaient debout, les chapeaux, les cannes, les ombrelles tournoyèrent avec allégresse.

Le « Wawaron » descendit, tous distinguèrent son nom et purent voir Baptiste 1er et le duc de Ste-Cunégonde revêtus de leur costume d’apparat.

Baptiste s’avançant sur l’avant de l’auto-aérien, prit son porte-voix et lorsqu’il fut assez près pour être entendu, il leur dit :

« Canayens, mes amis, levez vos regards vers nous et contemplez deux illustres compatriotes.

Tout d’abord ce fut du silence, puis le tumulte recommença de plus bel, les uns poussaient des cris de joie, de félicitations, d’autres au contraire de désappointement, surtout les huissiers lorsqu’ils virent et constatèrent avec dépit que leur paperasse ne pouvait servir à rien. Comment aller servir du papier timbré à des bonhommes qui sont juchés à deux cents pieds de hauteur ?

Enfin le calme se rétablit et Baptiste Courtemanche put enfin se faire entendre :

« Amis et chers compatriotes, vous avez tous entendus par-