Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 8, 1879.djvu/543

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Sur ce passage, une certain Canthérius, de l’antique lignée des Cornélius, ou – comme il s’en vante lui-même, – de la descendance d’Asinius Pollion, m’accusait, dit-on, de sacrilège, naguère à Rome, parce qu’au lieu de citrouille je parle de lierre ; il a craint sans doute, que si, au lieu de citrouilles, naissaient des lierres, il n’eût plus pu boire en secret et dans les ténèbres. De fait, on a coutume de voir dans ces vases, nommés gourdes, les images des Apôtres ; mais il n’entend pas donner à son nom une telle origine. Si les noms changent si facilement, qu’on donne le nom des Emiles, consuls, aux Cornélius, tribuns séditieux, je suis surpris qu’il ne me soit pas permis de dire lierre au lieu de citrouille. Mais, arrivons aux choses sérieuses : Pour concombre ou lierre, le texte hébreu porte Ciceion, et en langue syriaque et punique, ciceia. C’est une sorte de plante ou d’arbuste aux feuilles larges comme le pampre, à l’ombre très-épaisse, se soutenant sur son propre tronc ; elle naît abondamment en Palestine, surtout dans les terrains sablonneux ; il est merveilleux, si l’on jette sa semence en terre, de voir la rapidité avec laquelle elle naît et s’élève en arbre, et à peine l’a-t-on vue en herbe qu’on la retrouve arbuste quelques jours après. Pour moi, au temps ou j’interprétais les Prophètes, je voulais d’abord transcrire le nom hébreu lui-même, la langue latine n’ayant pas de mot pour ce genre d’arbuste ; mais je craignis que les grammairiens, si je leur laissais l’entière liberté du Commentaire, ne vissent là quelque bête de l’Inde, ou quelque montagne de Béotie, ou toute autre monstruosité de cette sorte, et, je suivis les anciens traducteurs, qui ont mis lierre, en grec χισσὁς, n’ayant pas mieux à dire. Recherchons donc le sens historique, et avant d’aborder le sens mystique, discutons la lettre seule. La nature du concombre et du lierre est de ramper sur la terre, et de ne pouvoir s’élever au-dessus qu’au moyen de fourches ou de tuteurs qui les soutiennent. Comment donc, à l’insu du Prophète,