Aller au contenu

Page:Jerome - Œuvres complètes, trad. Bareille, tome 9, 1881.djvu/150

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il jettera un môle, et il prendra la forteresse et les embellissements terrestres qu’elle a ; il lui prouvera sa fragilité dans les choses mêmes par où elle se flattait auparavant d’avoir quelque force. Lorsque tout cela sera accompli, l’esprit de Dieu changera ; il ne punira point comme il avait puni auparavant, et, passant outre aux pécheurs, il priera pour eux et les réconciliera avec leur Seigneur d’autrefois. Toutes ces merveilles montrent la force de notre Dieu, qui a pu faire de si grandes choses. De tels passages, on le voit, sont hérissés de difficultés, et le sens mystique est bien loin de la vérité historique : ce que nous avons interprété selon la lettre contre les Chaldéens, maintenant, au figuré, exprime la clémence divine et la liberté de ceux qui ont échappé aux mains des Chaldéens. L’histoire est étroitement bornée et n’a pas le droit de courir hors de son cadre ; la tropologie est libre et n’est circonscrite par d’autres lois que celles de suivre toujours le côté pieux du sens et le plan du discours, et de ne pas faire violence à l’interprétation, en réunissant des choses trop contraires.


« Seigneur, dès le commencement, n’est-ce point vous qui êtes mon Dieu et mon salut ? Ne mourrons-nous pas ? Seigneur, vous l’avez donc établi juge et assis sur les fondements de la force, pour être l’instrument de vos châtiments ? » [1]. Les Septante : « Seigneur, dès le commencement, n’êtes-vous point mon Dieu et mon salut ? Ne mourrons-nous pas ? Seigneur, vous l’avez établi juge ; et il m’a formé, afin que je reprenne selon sa discipline. » La traduction do Symmaque est plus claire : « N’étiez – vous point dès le commencement, Seigneur mon Dieu, mon salut, afin que nous ne mourrions pas ? Seigneur, vous l’avez établi pour juger, vous l’avez affermi dans la force pour punir. » À la plainte du Prophète : « Jusques à quand, Seigneur, crierai-je vers vous, sans que vous m’écoutiez ? » Dieu avait répondu : « Jetez les yeux sur les nations », et, après un préambule, il avait ajouté : « Voilà que je vais susciter les Chaldéens, nation pleine d’amertume et très agile », et toute la description suivie de ces mots, soit au sujet de Nabuchodonosor, soit au sujet du diable : « Alors son esprit sera changé, il passera, puis il tombera, et voilà quelle est sa force qui lui vient de son Dieu. Ce qu’entendant le Prophète, et comprenant que Nabuchodonosor reçoit la puissance contre Juda, ou le diable contre les fidèles, pour les punir, et que, cette punition infligée, il sera puni lui-même enfin, il répond au Seigneur : Vous êtes donc, Seigneur mon Dieu, mon salut – il parle ainsi avec l’affection d’un fils caressant et repentant, — celui qui nous a créés au commencement ? par la miséricorde de qui nous existons jusqu’à présent ? car je ne savais pas que nos ennemis eussent tant de pouvoir, et j’ignorais que Nabuchodonosor ou le diable eût reçu l’empire sur

  1. Hab. 1, 12