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aurait pu mettre en péril. Il fallait à cette âme privilégiée une autre destinée que celle qu’elle avait rêvée : il lui fallait la souffrance, le renoncement et les sacrifices, pour la préparer au rôle qui lui était réservé.

Aussi devait-elle voir tout d’abord s’évanouir toutes ces espérances qu’un cœur de dix-huit ans fonde sur l’avenir, surtout quand il aime et qu’il est aimé ; puis, comme préparation suprême au rôle de mère des pauvres, elle devait contracter une union qui ne servirait qu’à lui donner l’auréole de la maternité, sans les joies d’une affection sincère et chrétienne.

La première épreuve frappa Mlle Dufrost sous la forme d’une cruelle déception, et ce fut sa mère bien-aimée qui lui brisa le cœur, en même temps qu’elle brisait son avenir !

Un médecin irlandais, M. Timothée Sullivan, qu’une mauvaise réputation avait malheureusement précédé au pays, si l’on en croit les biographes de Mme d’Youville, épousa Mme de La Jemmerais, et ce second mariage de sa mère fut l’occasion d’une rupture entre Mlle Dufrost et le jeune homme qu’elle avait distingué.

Était-ce son titre d’étranger qui prévenait contre M. Sullivan, ou était-ce, en effet, son inconduite ? On ne sait, et les contemporains de Mme d’Youville semblent ne rien affirmer de positif sur ce point. Cependant on ne peut s’empêcher de trouver exces-