Page:Jevons - La monnaie et le mécanisme de l’échange.djvu/280

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par chaque pièce de monnaie dans une unité de temps, soit en un an. Pour obtenir la somme des échanges que la monnaie opère, nous devons multiplier la quantité de la monnaie par le nombre moyen de fois que chaque pièce ou chaque billet change de propriétaire dans le cours d’une année. Or nous ne connaissons que d’une manière imparfaite la quantité de monnaie que possèdent la plupart des pays, et nous ne savons rien du tout sur la rapidité moyenne de la circulation. Certaines pièces, surtout les petites pièces d’argent ou de bronze, peuvent chaque jour changer plusieurs fois de propriétaire. D’autres pièces ou billets peuvent être gardés en poche pendant des semaines entières, ou même être mis de côte pendant des mois et des années. Je ne sache pas qu’on ait jamais essayé de déterminer dans aucun pays la rapidité moyenne de la circulation ; et je n’ai jamais pu imaginer aucun moyen d’approcher du résultat de cette investigation, si ce n’est en suivant la voie inverse. Si nous connaissions le total des échanges effectués et la quantité de numéraire employé, nous pourrions obtenir par une division le nombre moyen des mains par lesquelles le numéraire passe successivement ; mais les données, ainsi que je l’ai déjà dit, nous manquent totalement.

Il est certain que la rapidité de la circulation varie considérablement d’un pays à l’autre. Un peuple économe, à qui ses banques n’offrent que peu de facilités, comme les Français, les Suisses, les Belges et les Hollandais, amasse beaucoup plus d’espèces qu’un peuple imprévoyant, comme les Anglais, ou même qu’un peuple prudent, pourvu d’un système de banques parfait, comme les Écossais. Il y a aussi une foule de circonstances qui influent sur la rapidité de la circulation. Les chemins de fer et les paquebots nous permettent de faire bien plus promptement qu’autrefois des envois d’or et de lingots ; les télégraphes nous dispensent de déplacer l’argent sans nécessité, et le service des postes, devenu bien plus rapide, produit le même effet. Il y a eu en Angleterre, vers 1842, une diminution dans la circulation des billets de banques provinciales ; elle a été attribuée à la réforme postale et aux facilités plus grandes qu’elle donnait pour renvoyer les billets par la poste.