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Page:Jodelle - Les Œuvres et Meslanges poétiques, t. 1, éd. Marty-Laveaux, 1868.djvu/171

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AGRIPPE.
L’orgueil est tel, qui d’un malheur guerdonne
La malheureuse et superbe personne.
Mesmes ainsi que d’un onde le branle,
Lors que le Nord dedans la mer l’ébranle,
Ne cesse point de courir et glisser,
Virevolter, rouler, et se dresser,
Tant qu’à la fin dépiteux il arrive,
Bruyant sa mort, à l’ecumeuse rive :
Ainsi ceux la, que l’orgueil trompe ici,
Ne cessent point de se dresser ainsi,
Courir, tourner, tant qu’ils soyent agitez
Contre les bords de leur felicitez.
C’estoit assez que l’orgueil pour Antoine
Precipiter avec sa pauvre Roine,
Si les amours lascifs et les delices
N’eussent aidé à rouër leurs supplices,
Tant qu’on ne sçait comment ces dereiglez
D’un noir bandeau ses sont tant aveuglez
Qu’ils n’ont sçeu voir et cent et cent augures,
Prognostiqueurs de miseres futures.
Ne veit on par Pisaure l’ancienne
Prognostiquer la perte Antonienne,
Qui des soldats Antoniens armee
Fust engloutie et dans terre abysmee ?
Ne veit on pas dedans Albe une image
Suer long temps ? Ne veit on pas l’orage
Qui de Patras la ville environnoit,
Alors qu’Antoine en Patras sejournoit,
Alors que le feu qui par l’air s’eclata
Heraclion en pieces escarta ?
Ne veit on pas, alors que dans Athenes
En un theatre on luy monstroit les peines ?
Ou pour neant les serpens-piés se mirent,
Quand aux rochers les rochers il joignirent,
Du Dieu Bacchus l’image en bas poussee