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le robinson suisse.

moi. — Oh ! ceux-ci seront très-bons et très-frais. Ils ne viennent point de la Suisse, mais de la mer Glaciale, où on les pêche par milliers. Malgré leurs ennemis de toutes sortes, sans compter l’homme, tels que dauphins, chiens de mer, esturgeons, dorades, bonites, oiseaux voraces, leur race subsiste toujours ; la nature leur a accordé une fécondité vraiment merveilleuse. On a compté, dans une femelle de grosseur ordinaire, plus de soixante-huit mille œufs.

fritz. — Ainsi, mon père, vous êtes persuadé que ce sont des harengs ?

moi. — Je n’en douterais pas si je connaissais mieux les parages où nous nous trouvons. Mais que ce soit des harengs ou d*autres poissons, sachons leur faire bon accueil. »

Déjà le banc mouvant entrait dans la baie ; les harengs, sautant un peu hors de l’eau les uns par-dessus les autres, présentaient au soleil leur ventre, couvert d’écailles argentées. Je tirai sur le sable notre bateau de cuves et le posai sur de grosses poutres ; ma femme et Jack le nettoyèrent, tandis que moi et mes enfants, nous avançant dans l’eau, nous prenions les harengs avec nos mains et avec des seaux de calebasses ; ma femme et Jack les vidaient à l’instant même et plaçaient le poisson dans les cuves, en ayant soin de mettre une couche de sel entre chaque couche de harengs. Cette pêche dura une semaine ; chaque jour nous emplissions une tonne, dont je fermais l’ouverture avec des planches et un enduit de terre glaise. Pendant ce temps, le hareng frais, accommodé de plusieurs façons, fut notre principale nourriture.

Les débris de harengs, que nous avions jetés dans l’eau, attirèrent des chiens de mer, poissons du genre squale. Leur chair ne vaut rien, mais leur peau épaisse fournit un cuir excellent pour courroies, brides, chaussures, etc., et leur graisse est bonne à brûler. Mes fils, armés de bâtons et de pieux, partirent pour assommer une douzaine de ces animaux. Ceci me fournit l’occasion de remarquer que les en-