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le robinson suisse.

feuilles épaisses, placées en petits toits, défendaient les fentes contre les ardeurs du soleil. Mes deux fils venaient de partir, montés chacun sur leur bête, emportant avec eux des calebasses, et suivis de leurs chiens, quand ma femme me dit :

« Que je suis étourdie ! j’ai donné à mes enfants une grande calebasse qu’on ne peut tenir qu’à deux mains ou porter sur la tête ; ils perdront la moitié de leur résine avant d’avoir fait cent pas.

moi. — Ne t’inquiète pas trop à ce sujet, ma chère amie : ils chercheront quelque expédient pour se tirer d’embarras. Mais quels vases plus commodes aurais-tu pu leur donner ?

ma femme. — J’aurais dû aller voir si elles étaient mûres. Peut-être ne sont-elles pas seulement encore levées.

moi. — Elles ? elles ? je ne comprends pas ce que tu dis.

ma femme. — Eh bien, viens avec moi. Tu verras qu’à la place des pommes de terre arrachées par nous pour la provision d’hiver j’ai planté quelques graines de courges d’Europe, surtout de celles dont les pèlerins et les soldats se font des gourdes de voyage.

moi. — Puissent-elles avoir réussi ! quel trésor pour nous ! Allons au champ de pommes de terre ; il n’est pas loin : la course ne peut point te fatiguer. »

Arrivés à la plantation, nous trouvâmes bon nombre de courges, les unes déjà mûres, plusieurs déjà gâtées, enfin une trentaine d’autres encore vertes. Nous choisîmes les meilleures. De retour à la maison, je fis à l’endroit où la queue s’attache au fruit un petit trou rond par lequel sortirent les semences et la chair réduites en morceaux. Nous rinçâmes les courges avec du petit plomb et des cailloux pointus. Les plus petites firent des tasses et des soucoupes ; je façonnai les plus grandes en entonnoirs et en autres ustensiles du même genre. Ce travail, interrompu par le dîner, nous occupa jusqu’au soir. Mes deux messagers arrivèrent ; je leur demandai s’ils avaient fait bonne récolte.

« Excellente récolte ! répondit Fritz, et, de plus, bien des