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le robinson suisse.

donnai en plaisantant à la petite éminence où Jack avait découvert les autruches et les avait prises pour des cavaliers arabes. Une fois là, je laissai mes deux plus jeunes fils aller en avant. La plaine était si unie, que je ne pouvais pas les perdre de vue, et, d’ailleurs, je leur avais recommandé de ne pas trop s’éloigner de nous, de façon à revenir au premier signal.

Pendant que mes deux espiègles galopaient dans la plaine, je recueillais, avec l’aide de Fritz, l’euphorbe aux arbres où j’avais pratiqué des incisions. Le soleil avait déjà durci la gomme, qui avait pris la forme d’une petite boule jaune. Nous mîmes notre récolte dans un vase de bambou que j’avais apporté à cette intention, et je remarquai qu’elle était bien plus forte que je ne l’espérais.

Notre avant-garde s’était singulièrement éloignée. Elle avait de beaucoup dépassé le nid d’autruches, et je crus m’apercevoir que ce n’était pas sans intention, car je vis les deux cavaliers faire volte-face et revenir vers nous, sans doute pour chasser dans notre direction les autruches qu’ils rencontreraient. Ce plan n’était pas mauvais, et si, comme je le supposais, le nid était occupé par le mâle ou la femelle, nous avions bien des chances favorables.

Fritz, qui voulait à toute force prendre une autruche vivante, eut soin d’envelopper de coton le bec et les serres de son aigle, afin de rendre moins meurtrières ces armes terribles de l’oiseau royal. Ayant, de mon côté, plus de confiance dans l’agilité de mon fils aîné que dans la mienne, je lui rendis momentanément l’onagre et je montai sur l’ânon. Pour ne pas effaroucher d’avance notre gibier, nous attachâmes les chiens et leur mîmes un bâillon qui comprimait leurs aboiements. Tous ces préparatifs étant achevés, nous avançâmes avec précaution vers le nid d’autruches. Bientôt nous vîmes se lever quatre de ces superbes oiseaux qui venaient à notre rencontre. Je fis faire halte, et nous restâmes dans la plus complète immobilité pour leur per-