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Page:Johann David Wyss - Le Robinson suisse (1861).djvu/367

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le robinson suisse.

cun rouage, et, d’un autre côté, comme les machines travaillaient seules, au bout de la journée nous trouvions toujours une bonne partie de besogne faite sans aucune fatigue pour nous.

Le premier essai de ce nouveau système de pilage fut tenté sur le riz, et, le soir, nous reconnûmes avec plaisir que la portion placée dans chacun des six mortiers était complétement débarrassée de la paille, et propre, sans autre préparation, à être employée à la cuisine. Rien, d’ailleurs, ne nous pressait outre mesure, puisque nous ne faisions fonctionner nos foulons que pour notre consommation particulière, et non pour en faire un commerce. Quoique l’opération fût lente, les produits obtenus dans un seul jour étaient toujours plus considérables de beaucoup que ce dont nous avions besoin pour notre entretien quotidien.

Nous avions établi nos moulins près du champ ensemencé de blé, de maïs et d’orge. Je remarquai, tout en travaillant, que nos poulets et nos dindons faisaient de fréquentes excursions dans ce champ, et en revenaient la panse bien remplie. C’est qu’en effet le grain était déjà mûr, bien qu’il ne fût semé que depuis quatre ou cinq mois. Nous pouvions donc désormais espérer deux récoltes par an. Je dis aussitôt qu’il fallait s’occuper de le moissonner ; car d’un moment à l’autre nous devions nous attendre à recevoir la visite des harengs et des chiens de mer. C’était l’époque de leur apparition.

Je décidai que nous expédierions la récolte, quitte à perdre quelques boisseaux de grains, afin d’être en mesure pour tout faire. Ma femme, à ces mots, jeta les hauts cris ; elle prétendait que notre blé et notre orge étaient bien autrement précieux que des harengs, dont il nous restait encore une provision assez importante ; que, d’un autre côté, les pommes de terre et le manioc réclamaient les soins de tous, en sorte qu’avec notre manie pour la pêche nous arriverions à manquer des choses de première utilité.