En terminant cette lettre, Ernest partit d’un éclat de rire immodéré qu’il accompagna d’une gambade joyeuse ; mais ce mouvement fit tomber de sa poche un second papier plus petit que l’autre, et, comme j’allais le ramasser, il me prévînt avec empressement et se hâta de dire : « Ceci est le courrier particulier de Waldegg ; toutefois, si Vos Seigneuries le désirent, je me ferai un plaisir de leur en donner connaissance. Peut-être y trouverons-nous des renseignements plus exacts que dans la dépêche officielle de Sydney-Cove. Le gouverneur général paraît avoir été abusé par des rapports exagérés.
— Voyons, Ernest, repris-je alors, que signifie cette plaisanterie ? Fritz t’aurait-il laissé quelque lettre pour moi, en te recommandant de ne me la remettre qu’aujourd’hui ; ou bien aurais-tu réellement découvert la trace de quelque bête féroce ? Il me semble qu’il n’y aurait pas là matière à plaisanterie.
— Voici la vérité. Cette lettre a été apportée hier par un de nos pigeons que les chasseurs ont pris avec eux, et, sans l’obscurité, j’aurais été la chercher le soir même et vous aurais donné tout de suite les détails qu’elle contient et leur explication.
— À la bonne heure ! c’est une heureuse idée que vous avez eue là ; on pourra l’utiliser souvent. Mais je ne suis pas tranquille au sujet de ces hyènes. Que faut-il en penser ? Est-ce de ton invention ou bien y a-t-il quelque chose de vrai ?
— Voici, reprit Ernest, la lettre telle qu’elle est arrivée. Je la lis sans y changer un mot.
« Chers parents et cher Ernest, une hyène énorme a attaqué notre troupeau ; elle a dévoré deux agneaux et un bélier. François l’a blessée et nos chiens ont achevé de la tuer. Sa peau est fort belle, notre journée s’est passée à la dépouiller.