tile que l’était notre île. Nos deux habitations, Felsheim et Falkenhorst, réunissaient désormais tous les avantages de la commodité et du luxe qu’il nous était permis d’espérer. La première était notre résidence d’hiver, notre principale demeure, notre quartier général. Là se trouvaient toutes nos richesses et presque toutes nos provisions. Falkenhorst était comme notre maison de campagne, séjour charmant l’été, à cause de la fraîcheur due à sa construction particulière au milieu d’un arbre. Tout alentour nous avions construit des étables pour notre gros bétail, des cages pour notre basse-cour, des ruches pour nos abeilles, des nids pour nos pigeons.
C’était au moyen de calebasses percées par un côté que nous logions ces derniers ; nous en avions suspendu un grand nombre aux branches d’arbres qui entouraient notre demeure, et chacune de ces calebasses était surmontée d’un petit toit en écorce d’arbre qui mettait le nid à l’abri de la pluie. Nos pigeons s’y étaient habitués aussi bien qu’à Felsheim, où se trouvait le colombier central. Mais de toutes nos richesses, celle qui avait peut-être prospéré dans une proportion plus étonnante, c’étaient nos abeilles. Les ruches nous fournissaient tous les ans une récolte de miel si abondante, que nous n’avions nullement à nous préoccuper de l’économiser ; aussi le miel entrait-il dans la fabrication de beaucoup de nos produits ; pour obtenir un nouvel essaim, il nous suffisait, peu de jours après la fin de la saison des pluies, de construire une simple ruche dans le voisinage, nous la trouvions toujours habitée au bout de peu de temps.
Cette multiplication d’abeilles nous attira la visite d’un grand nombre de ces oiseaux nommés mérops ou mangeurs d’abeilles, et nous fûmes obligés de leur tendre des gluaux : plus d’une abeille y fut prise aussi, cela est vrai ; mais, d’un autre côté, notre cabinet d’histoire naturelle s’enrichit d’une belle collection d’oiseaux au plumage varié et à la forme élégante.