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le robinson suisse.

arbres, poussant dans tous les sens, avaient forme une barrière si épaisse et si serrée, qu’une souris n’aurait pu passer au travers. À gauche, des rochers abrupts dans lesquels se trouvait notre grotte de cristal, et plus loin le marais des Canards, formaient une barrière naturelle qui interceptait toute communication avec la plage qui s’étendait au delà ; nous avions fait devant le marais une plantation de bambous plus utiles pour nos usages journaliers que comme défense. Derrière la maison enfin se dressait la ligne des rochers inaccessibles que nous n’avions même pas explorés, mais qui de ce côté mettaient nos domaines à l’abri de tout danger ; en face de nous enfin, le rivage, qui descendait vers la mer. On ne pouvait donc pénétrer dans nos domaines, en venant de l’intérieur de l’île, que par le pont de la Famille sur le ruisseau du Chacal. Mais ce pont, dont nous avions fait un pont-levis, était en outre flanqué de deux canons de six. Du côté de la mer, nous avions une contre-batterie de deux canons du même calibre, et la pinasse armée de deux coulevrines et de deux autres canons ; tels étaient nos moyens de défense.

Tout le terrain situé entre notre galerie et le ruisseau du Chacal, en remontant vers sa source était occupé par nos plantations. Elles étaient fermées par une palissade de bambous qui partait en droite ligne de l’habitation et aboutissait au ruisseau. Dans l’espace triangulaire qu’elle séparait étaient un petit champ de blé, un autre plus petit de coton, quelques plans de cochenille, et enfin le verger de ma femme, où croissaient les arbres fruitiers du pays ou d’Europe. Nos champs principaux de maïs, d’orge, d’avoine, de seigle et enfin de blé étaient sur l’autre rive du ruisseau, mais toujours en vue. Nous n’avions de ce côté que ce qu’il nous fallait pour avoir sous la main les produits nécessaires à notre usage journalier. Parmi les arbres fruitiers, ceux que nous avions exportés venaient beaucoup moins bien que les autres : la chaleur du climat, sans doute, ne leur convenait pas, car nos pommes et nos poires étaient aigres et dures ;