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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/140

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doctrines rigides et bien assises de Ricardo, Malthus et Mac Culloch. L’assaut que leur fit subir Ruskin n’était pas le premier. Carlyle, qu’il son maître, n’avait cessé de lancer épigrammes, sarcasmes et quolibets contre la « science lugubre » et ses adeptes. Dickens, Kingsley, et d’autres romanciers s’étaient élevés violemment contre la philosophie à la Gradgrind du travail et les malheurs sociaux et moraux qu’elle engendrait. Maurice et les socialistes chrétiens s’étaient indignes contre la Ploutonomie des économistes orthodoxes dont John Stuart Mill se séparait dans une large mesure. La correspondance entre Mill et Comte et la Politique de ce dernier montrent à quel point la philosophie positive s’éloignait de la ploutonomie orthodoxe ; mais de tout cela, en 1860, John Ruskin était et resta toute sa vie profondément ignorant. Il n’en était pas moins plein de la pensée de Carlyle, il était en étroite communion avec Maurice et ses amis et tous deux partageaient les idées des révolutionnaires et des socialistes que les événements européens de 1848 à 1860 rendirent familiers aux penseurs anglais. Ruskin ne fut donc, en aucune façon, le premier à élever des doutes sur l’évangile de Ricardo et de Mac Culloch, mais il fut certainement le premier à ouvrir le feu contre le credo et le décalogue de cet évangile et à formuler ces doutes et ces critiques en une forme