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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/166

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misères humaines, tous les deux si courageux, si prompts à l’attaque et également doués de l’éloquence la plus enflammée, tous les deux amoureux platoniques mais continuellement choyés par des femmes excellentes, tous les deux d’abord si recherchés puis si souvent méprisés et finissant l’un et l’autre dans un tel naufrage, dans une sorte de désespoir ! John Ruskin, lui aussi, dans ses dernières années, au milieu du déclin de ses facultés, aurait pu dire avec moins d’irrévérence et d’arrogance, en tournant les pages de ses premiers livres : « Dieu quel génie j’étais, quand j’écrivais cela ! » Lui aussi aurait pu prendre pour épitaphe « Sœva indignatio cor lacerabat », et il aurait pu ajouter — et mentem conturbat.

Durant toute la période qui s’écoula entre la mort de son père, en 1864, et sa retraite à Brantwood, Ruskin fut continuellement occupé par des conférences en divers lieux et sur des sujets variés mais principalement sur les rapports de la morale avec l’Art et la Vie. Il parlait tantôt sur les cristaux, sur les plantes, sur la géologie des Alpes, tantôt sur l’éducation des jeunes filles, sur la lecture, sur la guerre, les salaires, la musique, la danse ou sur l’avenir de l’Angleterre, mais il revenait toujours à la même idée dominante — d’une vie saine et heureuse dans une société laborieuse et bien ordonnée. Il serait fastidieux d’analy-