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Page:John Ruskin par Frédéric Harrison.djvu/295

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chaque année, à Trafalgar Square. Un des côtés étranges chez Ruskin c’est l’indifférence qu’il eut dans sa jeunesse pour l’Italie et l’art italien. En quittant Oxford, à l’âge de 22 ans, il séjourna à Florence et à Rome et il assure, très sincèrement, « qu’il n’avait aucune idée de l’art chrétien primitif. » Il éprouva « une véritable déception » à Florence, « tout l’art sacré lui parut nul », et la Tribune des Uffizi « un inconvenant mélange formé par des gens qui n’y entendaient rien et ne se souciaient de rien moins que de l’art ». À mesure que l’on approchait de Rome, ses parents, en vrais calvinistes, remarquèrent triomphalement que « les routes devenaient de plus en plus mauvaises ». Le Forum, Saint-Pierre, le Colisée, le Capitole étaient également « sans intérêt ». La « Transfiguration de Raphaël était « une vilaine peinture ». Les « Loges », ne pouvaient plaire à personne. Il fut aussi désappointé par Naples et ses environs. Pour nous, en plein xxe siècle, il semblera incroyable que, il y a soixante ans, un jeune homme doué d’un tel génie artistique, qui, depuis son enfance, avait écrit sur l’art, qui l’avait étudié à fond ait pu faire preuve d’une si grossière ignorance lors de son premier voyage en Italie. Mais nous devons nous souvenir de tous les changements que, dans le cours de ces soixante années, la lecture des Modern Painters et des Sept Lampes a produit en