Page:John Stuart Mill - De l’assujettissement des Femmes.djvu/37

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vestige d’un vieux monde intellectuel et moral détruit partout, mais conservé en un seul point, celui qui présente l’intérêt le plus universel. C’est comme si un dolmen gigantesque ou un vaste temple de Jupiter Olympien s’élevait à la place qu’occupe Saint-Paul, servant au culte quotidien, tandis qu’autour de lui les églises chrétiennes ne s’ouvriraient qu’aux jours fériés. Cette dissonance entre un fait social unique et tous les autres faits qui l’entourent, et la contradiction que ce fait oppose au mouvement progressif, orgueil du monde moderne, qui a balayé l’une après l’autre toutes les institutions frappées du même caractère d’inégalité, ont de quoi fournir aux réflexions d’un observateur sérieux des tendances de l’humanité. De là contre l’inégalité des sexes une présomption primâ facie bien plus forte que celle que la coutume et l’usage peuvent créer en sa faveur dans les circonstances actuelles, et qui suffirait seule à laisser la question indécise, comme le choix entre la république et la monarchie.

Le moins qu’on puisse demander, c’est que la question ne soit pas préjugée par le fait existant et l’opinion régnante, qu’elle reste ouverte au contraire, que la discussion s’en empare, et l’agite au double point de vue de la justice et de l’utilité : ici comme pour toutes les autres institutions sociales, la solution devrait dépendre des avantages que, d’après une appréciation