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J’imposerai aux candidats la solennité du serment. Il n’est pas question ici d’un serment prêté à la nation, comme l’entendaient vos révolutionnaires de 89 ; je veux un serment de fidélité prêté au prince lui-même et à sa constitution.

Montesquieu.

Mais puisque en politique vous ne craignez pas de violer les vôtres, comment pouvez-vous espérer qu’on se montrera, sur ce point, plus scrupuleux que vous-même ?

Machiavel.

Je compte peu sur la conscience politique des hommes ; je compte sur la puissance de l’opinion : personne n’osera s’avilir devant elle en manquant ouvertement à la foi jurée. On l’osera d’autant moins, que le serment que j’imposerai précédera l’élection au lieu de la suivre, et qu’on sera sans excuse de venir rechercher le suffrage, dans ces conditions, quand on ne sera pas à l’avance décidé à me servir. Il faut maintenant donner au gouvernement le moyen de résister à l’influence de l’opposition, d’empêcher qu’elle ne fasse déserter les rangs de ceux qui veulent le défendre. Au moment des élections, les partis ont pour habitude de proclamer leurs candidats et de les poser en face du gouvernement ; je ferai comme eux, j’aurai des candidats déclarés et je les poserai en face des partis.