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Montesquieu.

Si vous n’étiez pas tout-puissant, le moyen serait détestable, car, en offrant ouvertement le combat, vous provoquez les coups.

Machiavel.

J’entends que les agents de mon gouvernement, depuis le premier jusqu’au dernier, s’emploient à faire triompher mes candidats.

Montesquieu.

Cela va de soi, c’est la conséquence.

Machiavel.

Tout est de la plus grande importance en cette matière. « Les lois qui établissent le suffrage sont fondamentales ; la manière dont le suffrage est donné est fondamentale ; la loi qui fixe la manière de donner les billets de suffrage est fondamentale[1]. » N’est-ce pas vous qui avez dit cela ?

Montesquieu.

Je ne reconnais pas toujours mon langage quand il passe par votre bouche ; il me semble que les paroles que vous citez s’appliquaient au gouvernement démocratique.

Machiavel.

Sans doute, et vous avez déjà pu voir que ma politique essentielle était de m’appuyer sur le peuple ; que, quoique je porte une couronne, mon

  1. Esp. des lois, p. 12 et s., liv. II, et s., ch. II, et s.