Page:Joly - Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu.djvu/235

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 222 —

le passé, je vois très-clairement qu’il ne peut subsister qu’aux conditions suivantes : il faut, en premier lieu, que le monarque absolu soit un chef militaire, vous le reconnaissez sans doute.

Machiavel.

Oui.

Montesquieu.

Il faut, de plus, qu’il soit conquérant, car c’est à la guerre qu’il doit demander les principales ressources qui lui sont nécessaires pour entretenir son faste et ses armées. S’il les demandait à l’impôt, il écraserait ses sujets. Vous voyez par là que ce n’est pas, parce que le monarque absolu dépense moins, qu’il doit ménager les tributs, mais parce que la loi de sa subsistance est ailleurs. Or, aujourd’hui, la guerre ne rapporte plus de profits à ceux qui la font : elle ruine les vainqueurs aussi bien que les vaincus. Voilà une source de revenus qui vous échappe.

Restent les impôts, mais, bien entendu, le prince absolu doit pouvoir se passer, à cet égard, du consentement de ses sujets. Dans les États despotiques, il y a une fiction légale qui leur permet de les taxer discrétionnairement : en droit, le souverain est censé posséder tous les biens de ses sujets. Quand il leur prend quelque chose, il ne fait donc que reprendre ce qui lui appartient. De la sorte, point de résistance.

Enfin, il faut que le prince puisse disposer,