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sans discussion comme sans contrôle, des ressources que lui a procurées l’impôt. Tels sont, en cette matière, les errements inévitables de l’absolutisme ; convenez qu’il y aurait beaucoup à faire pour en revenir là. Si les peuples modernes sont aussi indifférents que vous le dites, à la perte de leurs libertés, il n’en sera pas de même quand il s’agira de leurs intérêts ; leurs intérêts sont liés à un régime économique exclusif du despotisme : si vous n’avez pas l’arbitraire en finances, vous ne pouvez pas l’avoir en politique. Votre règne entier s’écroulera sur le chapitre des budgets.

Machiavel.

Je suis fort tranquille sur ce point, comme sur le reste.

Montesquieu.

C’est ce qu’il faut voir ; allons au fait. Le vote des impôts, par les mandataires de la nation, est la règle fondamentale des États modernes : accepterez-vous le vote de l’impôt ?

Machiavel.

Pourquoi non ?

Montesquieu.

Oh ! prenez garde, ce principe est la consécration la plus expresse de la souveraineté de la nation ; car lui reconnaître le droit de voter l’impôt, c’est lui reconnaître celui de le refuser, de le limiter, de réduire à rien les moyen d’action du