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gret violent du passé. C’est là un mot stoïque qui vous annonce le jour du châtiment.

Machiavel.

Vous me troublez. L’heure est venue de détendre les ressorts, je vais rendre des libertés.

Montesquieu.

Mieux vaut mille fois l’excès de votre oppression ; votre peuple vous répondra : gardez ce que vous avez pris.

Machiavel.

Ah ! que je reconnais bien là la haine implacable des partis. N’accorder rien à ses adversaires politiques, rien, pas même les bienfaits.

Montesquieu.

Non, Machiavel, rien avec vous, rien ! la victime immolée ne reçoit pas de bienfaits de son bourreau.

Machiavel.

Ah ! que je pénétrerais aisément à cet égard la pensée secrète de mes ennemis. Ils se flattent, ils espèrent que la force d’expansion que je comprime me lancera tôt ou tard dans l’espace. Les insensés ! Ils ne me connaîtront bien qu’à la fin. En politique que faut-il pour prévenir tout danger avec la plus grande compression possible ? une imperceptible ouverture. On l’aura.

Je ne rendrai pas des libertés considérables, à coup sûr ; eh bien, voyez pourtant à quel point l’absolutisme aura déjà pénétré dans les mœurs.