Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/220

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plus que ces princes ambitieux et nuls qu’ils commanditaient, sans partager leurs soucis et leurs dangers. Les fils de Grégoire Ghica II, ceux de Michel Racovita végétèrent dans ces humiliantes conditions. Plus tard, il fallut faire aussi la cour au consul russe, au consul autrichien, établi en 1782, dans la personne du marchand ragusan Raicevich, auteur d’une excellente description des Principautés ; quant au consul de France c’était un simple agent, sans mission commerciale bien définie, et celui de Prusse n’était qu’un maître de langues muni d’un bérat diplomatique et sans importance. Ces représentants des Puissances chrétiennes ne perdaient aucune occasion d’afficher leurs prétentions et d’exercer leur influence. Tel de ces Voé-vodes phanariotes, comme Alexandre Jean Maurocor-dato, qui devait fournir par sa fuite en Russie un des motifs de la guerre en 1780, représentait même, beaucoup plus que la suzeraineté de la Porte, cette protection russe envahissante, qui employait les Grecs pour révolutionner l’Orient et préparer la fin de l’Empire turc.

Situation des boïars et du peuple.— Ces créatures de Constantinople n’aimaient guère les boïars indigènes ; ceux-ci, de leur côté, quoique ne les aimant pas davantage, essayèrent bien rarement d’intriguer contre ceux qui jouissaient de la faveur ottomane et jamais ils ne se révoltèrent, laissant le soin des émeutes au bas peuple qu’aurait irrité la faveur de tel agent grec au service de la Cour. Ils avaient emprunté même aux maîtres une conception de l’État dans laquelle comptaient seuls les pauvres, les masses des contribuables, la fidèle « raïa », toujours soumise, de l’Empereur païen, alors qu’il fallait user de la dernière sévérité envers les nobles, les grands propriétaires fonciers, chefs obéis de leurs serfs qui, du reste, s’étant fait