Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/274

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Dans les Balcans, où le grand knèze serbe Michel, passionné de l’Yougoslavie de ses rêves, lui proposait une confédération balcanique capable de résister à tous ceux qui convoitaient la possession de Constan-tinople, en même temps que le prince du Monténégro courtisait le chef des Principautés et que le roi de Grèce cherchait à s’appuyer sur lui, il n’osa pas prendre une résolution. Cependant jamais la politique turque, séduite par l’idéal impossible d’un vrai Empire unitaire, pareil à celui de Napoléon, n’avait été si insolente : on avait imposé au fier Hohenzollern, non seulement le voyage à Constantinople, où l’on aurait voulu le traiter en haut fonctionnaire du Sultan, comme les Hospodars antérieurs à la guerre de Crimée, mais encore une convention formelle qui serrait plus étroitement les liens de la Principauté avec la Porte ; elle reconnaissait en effet que la Roumanie était une « partie intégrante » de l’Empire, ce qu’elle n’avait jamais été ; elle lui interdisait le droit, réclamé hautement par Cuza, de créer un Ordre et de battre monnaie, de recevoir des ministres étrangers et de conclure d’autres actes internationaux que de simples conventions de voisinage ; les ministres du Sultan, dont les remontrances avaient été déjà rejetées avec indignation en 1865 par le prince indigène, malgré sa situation précaire, ne craignirent pas, à l’occasion de nouveaux troubles, de lui signifier qu’il devait prendre garde « à ce que pareille scène ne se renouvelât plus ».

En outre, le nouveau prince était à la merci des partis auxquels il devait le pouvoir, partis qui, après s’être coalisés pour mettre fin au règne de Cuza, se divisèrent de nouveau ; des discordes acharnées éclatèrent en effet : entre les conservateurs de Démètre Ghica et de Lascar Catargi, les conservateurs progressistes de Manolachi Costachi et les libéraux, les « Rouges » révolutionnaires et républicains de Jean Bratianu,