Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/278

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demander aux suzerains la reconnaissance du nom de « Roumanie » et du droit de conclure des conventions, le thalweg du Danube pour frontière et la possession des îles du fleuve, donc du Delta aussi, qui avait été jadis incorporé par les diplomates de Paris à la Moldavie.

Un revirement se produisit cependant dans l’esprit du prince. Abreuvé d’humiliations, il venait d’être traité dans la Constitution ottomane du mois de décembre, de simple « chef de province privilégiée », ayant à recevoir des instructions pour sa participation à la guerre. Déjà un émissaire d’Ignatiev, le tout-puissant ministre de Russie à Constantinople, était venu à Bucarest pour négocier une convention secrète au cas où les troupes russes voudraient passer à travers la Principauté ; mais, comme il ne présentait pas de pouvoirs au nom du gouvernement lui-même et comme il donnait une forme louche à la garantie, réclamée par Bratianu, qu’on ne toucherait pas, en détruisant les clauses de 1856, aux districts bessara-biens réincorporés à la Moldavie, on n’avait rien conclu avec M. de Nélidov. Cette fois-ci, grâce à l’intervention personnelle du grand-duc Nicolas, ami de la Roumanie, l’affaire prit un cours plus rapide. Au moment où l’opiniâtreté du Ministère turc rendait inévitable un conflit armé, la convention était signée par Kogalniceanu, revenu aux Affaires Etrangères (avril 1877). Peu de jours plus tard, et sans avoir attendu que la convention fût ratifiée par le Parlement roumain, les troupes du Tzar entraient dans le pays ; une proclamation, de tous points pareille à celle de 1853, s’adressait, oubliant la présence d’un gouvernement, à la population des Principautés.

Il n’y avait pas cependant une entente nette et franche entre la puissante Russie, dont l’intention était de regagner son influence sur les bouches du Danube et