Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/289

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Teodorescu, à Bucarest même, et bientôt un professeur roumain de Brasov, André Bàrseanu, associé au philologue tchèque Jarnk, publiait le premier recueil transylvain de morceaux populaires choisis.

Les Convorbiri des junimistes furent engagées aussi dans cette voie, et bientôt on en vit les résultats. Les pâles imitations germaniques disparurent, de même qu’avaient disparu les fades pastiches de la poésie française. Un ancien diacre de Jassy, rude esprit jovial, fils du paysan Jean Creanga, commença d’écrire, au milieu de tous ces « savants » aux grandes prétentions, ses contes d’une vérité populaire si frappante ; un ouvrier typographe de Bucarest, Pierre Ispirescu, abonda dans ce même genre, sans avoir cependant la même énergie, le même humour rustique. Toute une littérature semblable suivit, attirant aux revues, aux calendriers, aux journaux, un public toujours plus étendu qui reconnaissait sa propre manière de penser et de sentir.

Alors apparurent les tableaux de la vie populaire, pareils à ceux qui ont créé à Bjoernsterne Bjoernson débutant, une si grande réputation. Il n’y avait aucune originalité dans la vie des classes supérieures ; elles ne faisaient que répéter ses modèles parisiens ; on se plongea donc dans l’étude des mœurs, simples et fortes du paysan. Par Jean Slavici, originaire de Hongrie, on eût pour la première fois le spectacle de la vie rurale au-delà des montagnes, et celle du paysan vala-que trouva un interprète d’une finesse de touche extrême et d’un rare sens de la couleur dans Barbu Stefanescu Delavrancea, né dans un faubourg de Bucarest. Dans Georges Cosbuc, venu de Nasaud, en Transylvanie, l’âme pleine de rythmes populaires, la poésie roumaine trouva le pendant de ces nouvelles. Quant à la vie pleine de contrastes des centres urbains, c’est-à-dire de ces couches sociales où se conservaient