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vii
Préface

physiologique indéfinissable, mais qu’on appelle infériorité de la race. La théorie des races inférieures est certainement frappée à mort avec la subite et renversante révélation des éminentes aptitudes des Japonais ; mais les entêtés de la doctrine de l’inégalité des races humaines ne manqueront pas d’essayer bientôt de faire passer les Japonais pour des blancs allophylles, sinon pour un peuple de race blanche d’Asie, comme seraient d’après eux les anciens Égyptiens ! Dans tous les cas, les nègres ayant toujours été considérés comme le type le plus abject de notre espèce, absolument incapable d’un haut développement intellectuel et moral, tout le temps qu’on ne fera pas toucher du doigt, pour ainsi dire, les causes de notre stagnation nationale, il faudra inévitablement s’attendre à la conclusion qu’elle est due à l’imperfectibilité de notre race. Une telle conclusion autorise contre nous toutes les prétentions et sanctionne toutes les injustices à notre égard. C’est par elle que nous voyons tant d’hommes connus pour leur bon sens et leur libéralisme, tel un Pierre Leroy-Beaulieu, ne point se faire un cas de conscience de persuader implicitement les Américains de nous effacer de la carte des états indépendants, ou à l’amiable ou par la force.

Quoi qu’on fasse, qu’on en parle tout haut ou qu’on veuille la voiler en des subtilités sournoises, la question de race domine fatalement le problème de la destinée d’Haïti. Tout le temps que les noirs continueront à être un objet de mépris par d’autres hommes, ou blancs ou jaunes, Haïti ne sera jamais prise au sérieux ; et la pire