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Page:Joseph Anténor Firmin - M. Roosevelt, président des États-Unis et la République d'Haïti, 1905.djvu/7

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Préface


Heureux, dit-on, sont les peuples qui n’ont pas d’histoire. Il semblerait, de là, qu’il vaudrait mieux continuer à vivre dans une éternelle pénombre et n’attirer aucune lumière indiscrète sur notre existence nationale. Plusieurs le disent, avec plus ou moins d’arrière-pensée ; et ceux-là s’indignent toutes les fois qu’on provoque sur Haïti le regard scrutateur de l’étranger. Ils préfèrent mourir dans le silence, plutôt que de crier leurs maux, dans le but d’y trouver un remède. Ils raisonnent comme Joseph de Maistre, lequel a écrit ce précepte : «Expressa nocent, non expressa non nocent. Il y a une infinité de choses vraies et justes qui ne doivent pas être dites et encore moins écrites.» Mais qu’était-ce que de Maistre ? Le préconisateur endiablé de l’obscurantisme, le logicien paradoxal d’une philosophie politique propre à ramener l’humanité à voir dans le despotisme, les privilèges de classe et les exactions de toute couleur, Tordre naturel des choses d’ici-bas. Je ne m’y suis donc pas arrêté ; et jai écrit toutes les vérités assainissantes, éclairantes, indispensables à entendre pour qu’on se détourne des habitudes d’esprit tangiblement hostiles à notre évolution de peuple organisé.

Ces considérations sur notre histoire, dévoilant les maux dont notre organisme national est affligé et dont l’influence pernicieuse paralyse si malheureusement notre développement économique, politique et social, étaient nécessaires pour convaincre ceux qui ne croient point à la possibilité de notre amélioration, parce qu’ils pensent que notre état actuel est le résultat d’une espèce de fatalité