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CORRESPONDANCE

la Grange a fait à Paris ; il était parti de Turin au commencement de novembre 1763 et y est retourné dans le courant de juin 1764. Il manque ici une ou deux Lettres que M. d’Alembert lui avait écrites après son retour à Turin, et qui ont été prêtées et perdues. Dans l’une d’elles il lui disait « J’ai lu votre pièce sur la libration de la Lune (elle avait remporté le prix de l’Académie des Sciences en 1764 ; M. d’Alembert n’avait pas pu être un des juges à cause du voyage qu’il avait fait en Prusse dans l’automne de 1763) et j’ai dit comme saint Jean-Baptiste : Oportet illum crescere, me autem minui. »


6.

LAGRANGE À D’ALEMBERT.

À Turin, le 30 mai 1764.

Mon cher et respectable ami, j’ai passé par Genève comme je me l’étais proposé, et, à la faveur de votre recommandation, j’ai eu l’honneur de dîner chez M. de Voltaire[1], qui m’a fait un très-gracieux accueil. Il était ce jour-là en humeur de rire, et ses plaisanteries tombaient toujours, comme de coutume, sur la religion, ce qui amusa beaucoup toute la compagnie. C’est, en vérité, un original qui mérite d’être vu.

J’ai été assez bien reçu ici du Roi[2] et des ministres ; on m’a donné de belles espérances, mais je n’y fais pas grand fond. Vos Lettres ont fait beaucoup d’impression à la cour et à la ville ; tout le monde en est encore rempli, et je puis bien vous assurer que vous êtes aussi connu ici qu’ailleurs. On ne cesse de me questionner sur votre sujet ; on est fort empressé surtout de savoir si vous viendrez en Italie quelque jour ; on brûle de vous connaître personnellement.

Je n’ai pas encore repris mon assiette ordinaire ; j’ai pourtant déjà barbouillé quelques pages sur les cordes vibrantes ; si je trouve

  1. Voltaire habitait alors sa campagne des Délices, près Genève. On ne trouve rien dans sa Correspondance sur cette visite de Lagrange.
  2. Charles-Emmanuel Ier.