Page:Joseph Louis de Lagrange - Œuvres, Tome 7.djvu/600

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par rapport à d’autres termes dont la valeur devient, par la supposition, infiniment plus grande d’où l’on voit que ce calcul n’est pas absolument rigoureux, et qu’il ne peut par conséquent donner un résultat exact, à moins qu’on ne regarde comme peu exacte la supposition sur laquelle on l’a établi, en sorte que l’erreur de l’hypothèse détruise tout à fait celle qu’on a commise dans le calcul.

À parler exactement, l’asymptote est une droite qui s’approche continuellement d’une courbe de manière que sa distance à la courbe puisse devenir moindre qu’aucune grandeur donnée, sans qu’elle soit jamais zéro absolu. Or cette condition rend fausse la supposition que l’asymptote soit une véritable tangente ; mais on la redresse ensuite dans le calcul, en faisant, pour ainsi dire, disparaître le point d’attouchement, en sorte que la tangente cesse d’être tangente, et devienne seulement la limite des tangentes, savoir la limite de la courbe même, ce qui est conforme à la nature de l’asymptote.

Il en est ici comme dans la méthode des infiniment petits, où le calcul redresse aussi de lui-même les fausses hypothèses que l’on y fait. On imagine par exemple qu’une courbe soit un polygone d’une infinité de petits côtés, dont chacun étant prolongé devienne une tangente à la courbe. Cette supposition est réellement fausse, car le petit côté prolongé ne peut jamais être autre chose qu’une véritable sécante ; mais l’erreur est détruite par une autre erreur qu’on introduit dans le calcul en y négligeant comme nulles des quantités qui, selon la supposition, ne sont qu’infiniment petites. C’est en quoi consiste, ce me semble, la métaphysique du calcul des infiniment petits, tel que l’a donnée \mathrm M. Leibnitz. La méthode de M. Newton est au contraire tout à fait rigoureuse, soit dans les suppositions, soit dans les procédés du calcul ; car il ne conçoit qu’une sécante devienne tangente que lorsque les deux points d’intersection viennent tomber l’un sur l’autre, et alors il rejette de ses formules toutes les quantités que cette condition rend entièrement nulles. Cette méthode exige absolument qu’on regarde comme évanouissantes, c’est-à-dire comme nulles, les quantités dont on cherche les premières ou dernières raisons, et c’est ce qui rend souvent les dé-