Page:Joseph Marchand - L'Université d'Avignon aux XVIIe et XVIIIe siècles.djvu/325

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tées, la scandaleuse indulgence qui présidait aux examens, tels candidats devenus coup sur coup bacheliers, licenciés et docteurs sans subir qu’une unique épreuve, d’autres gratifiés du bonnet sans savoir un mot de latin, l’amère satire de notre docteur dévoile sans pitié toutes ces plaies. Mais elle n’indique pas le remède ou ne veut voir que la faute des hommes là où était surtout le vice des institutions. Aussi le primicier a-t-il beau jeu de répondre par une apologie du Collège et un appel à de glorieuses traditions. Les lois romaines, dit-il, n’autorisent-elles pas, dans l’assemblée des agrégés, « la pluralité des suffrages » ? Le primicier, les professeurs ne sont-ils pas choisis avec le plus exact discernement ? Le plaignant lui-même n’a-t-il pas été deux fois élu primicier, plusieurs fois régent, à diverses reprises député à l’Hôtel de Ville ? Les ordonnances du roi de France sur les lectures, les matricules et les examens ne sont-elles pas appliquées à la lettre, tout aussi bien, du moins, que dans les Universités du royaume ? Si quelques abus persistent, ne peut-on pas les corriger sans peine et sans éclat. Les étaler en public, n’est-ce pas discréditer l’Université, lui ôter l’estime publique, faire le jeu de ses rivales, se conduire en fils ingrat qui ne sait point faire taire ses rancunes[1] ?

  1. A. V. D 160. L’origine de la querelle paraît avoir été la distribution faite aux docteurs d’une componende de 800 livres sur les greffes, et qu’un membre du Collège, M. de Saint-Laurent, jugea irrégulière. Il se plaignit au cardinal Torregiani, secrétaire d’État, et celui-ci l’ayant encouragé, M. de Saint-Laurent lui adressa, de mars à mai 1763, un grand nombre de lettres, dans lesquelles il insiste surtout sur l’affaire des 800 livres et sur la composition du Collège des docteurs, où figurent un grand nombre de membres des mêmes familles, ce qui entraîne une foule de cabales pour l’attribution des offices et des régences universitaires. Il voudrait que chaque famille ne disposât que d’un seul vote. Il voudrait également que les primiciers ne pussent être élus, avant d’avoir accompli leur quarantième année. Pour les autres abus qu’il signale, il n’indique pas de remède, sauf une application plus stricte des règlements. Le primicier, M. de Guilhermis, réfute point par point les ardentes philippiques de son collègue et insiste sur le danger de toute innovation. Il représente M. de Saint-Laurent comme fort irrité, parce qu’il n’a pas été élu député à l’Hôtel-de-Ville.